La grève à Hollywood a déjà entraîné la perte de 35 000 emplois. "Vous aurez de la chance si vous travaillez d’ici janvier 2024”
Les négociations restent au point mort alors que "l'anxiété" monte. Certains grévistes redoutent de ne plus travailler avant 2024.
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- Publié le 03-09-2023 à 18h08
- Mis à jour le 03-09-2023 à 18h09
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Ce lundi 4 septembre est jour de la fête du travail aux États-Unis, soit l’équivalent du 1er mai chez nous. Certains à Hollywood espéraient que ce week-end de trois jours serait propice à une reprise des négociations entre le syndicat des scénaristes (Writers Guild of America, WGA) et l’Alliance des producteurs de cinéma et de télévision (AMPTP). Officiellement, il n’en a rien été.
Les scénaristes entrent dans leur dix-neuvième semaine de grève et les acteurs dans la neuvième. “La grève atteint un tournant psychologique” constatait ce week-end la journaliste du site The Ankler, Elaine Low sur la newsletter Strikegeist qui chronique les événements.
Personne d’entre nous ne pensait que nous serions encore dans cette situation en septembre.”
”Je ne pense pas qu’aucun d’entre nous ne pensait que nous serions encore dans cette situation en septembre” lui a écrit un technicien, membre du syndicat IATSE, frustré.
Un acteur “qui a joué dans l’une des blockbusters de l’année”, a également témoigné auprès de Strikegeist que du jour au lendemain, ses agents sont passés de “Vous aurez des réunions avec toutes les grandes chaînes et tous les studios” à “Vous aurez de la chance si vous travaillez d’ici janvier 2024”.
Selon The Ankler, “la base d’Hollywood – producteurs, assistants, personnel de studio, responsables du développement et de la production – témoigne de son anxiété”.
Depuis leur dernière rencontre officielle, mi-août, le syndicat des scénaristes et l’Alliance des producteurs “semblent croire que la balle est dans le camp de l’autre pour répondre aux contre-propositions”.
17 000 emplois perdus en août
Dans l’immédiat, certains font les comptes. Selon des chiffres publiés le 1er septembre par le Bureau américain des statistiques du travail (Bureau of Labor Statistics, BLS). “Les industries du cinéma, de la télévision et de la musique enregistrent une baisse de 17 000 emplois [le mois dernier], conséquence du mouvement de grève” relève l’organisme public dans son rapport d’août.
S’y ajoutent la perte de 4000 emplois dans les chaînes de télévision et autres fournisseurs de contenus et 4000 autres suppressions d’emplois dans le secteur des télécommunications. Le BLS associe ses pertes à la grève. Au total, précise encore le rapport, le secteur a perdu 35 000 emplois au cours du trimestre écoulé – soit depuis le début de la grève des scénaristes.
Ces pertes d’emplois dans les industries des médias contrastent avec une croissance des emplois meilleure que prévu (malgré un taux de chômage en légère hausse de 3,5 % à 3,8 %).
Les effets négatifs se feront sentir au moins jusqu’au milieu de l’année prochaine.”
”Je suis convaincu que cette année sera une année perdue pour la plupart des studios et que les effets négatifs se feront sentir au moins jusqu’au milieu de l’année prochaine” a écrit un cadre licencié d’un studio à Strikegeist.
Sous couvert d’anonymat, cet ex-cadre continue : “Même si la grève se termine aujourd’hui, cela ne réparera pas les dommages causés aux produits des studios. Le quatrième trimestre sera difficile pour la plupart d’entre eux, avec une baisse des recettes publicitaires et des films en salle, ainsi qu’un taux de désabonnement plus élevé. Cela s’ajoute au problème structurel de la baisse des recettes de la télévision linéaire. Lorsque ces chiffres du quatrième trimestre seront publiés au début de l’année prochaine, cela créera une nouvelle vague de chaos car Wall Street sanctionnera les actions [des studios] et augmentera la pression sur les dirigeants pour qu’ils se débarrassent de leurs actifs et de leur personnel ou qu’ils cherchent à réaliser des fusions-acquisitions de dernière minute.”
Or, ce sont précisément les vagues successives de fusions-acquisitions qui ont indirectement provoqué la grève. Dans une étude publiée mi-août, le syndicat des scénaristes a dénoncé les situations de quasi-monopole qu’elles ont créé.
La WGA en a même appelé aux autorités américaines de la concurrence pour réguler le secteur des médias voire démanteler certains groupes.
Le 31 août, la secrétaire des Finances de l’État de Californie, Fiona Ma, a adressé un courrier officiel aux patrons de studios pour leur demander de revenir à la table des négociations. “L’impact de ces deux grèves paralyse Hollywood et se répercute dans tout l’État, affectant d’innombrables entreprises, des milliers de bénéficiaires de fonds de pension et des millions de Californiens”, a-t-elle écrit.