"Un monde" révèle la cinéaste belge Laura Wandel à Cannes

Dans son premier long métrage, présenté jeudi soir à Cannes, la réalisatrice filme, à hauteur d’enfant, ces violences qui transforment parfois les cours d’écoles en lieux de calvaire.

"Un monde" révèle la cinéaste belge Laura Wandel à Cannes
©D.R.

Cette première journée d’école, Nora (Maya Vanderbeque) ne la sent pas du tout. Lovée dans les bras de son grand frère, Abel (Günter Duret), elle tremble et pleure à chaudes larmes. Il a beau lui dire qu’ils se verront à la récré, elle est paniquée et ne veut rien savoir. Mais lorsqu’elle tente de le rejoindre à midi, Abel la rabroue. Il ne peut pas s’occuper d’elle car sa bande de copains terrorisent les nouveaux et si Nora passe par là… La fillette, têtue, ne l’écoute pas et le suit. Forcé de défendre sa sœur contre ses potes agresseurs, Abel bascule du camp des tortionnaires à celui des victimes. Et Nora, qui se sent fautive, ne sait pas du tout comment faire pour empêcher cela. Entièrement filmé à hauteur d’enfant, dans les pas de Nora, ce film de Laura Wandel (Les Corps étrangers) bouleverse et prend à la gorge. On vibre avec la petite fille, on tremble de son impuissance, de son mal-être, puis de sa rébellion face à des comportements qu’elle ne comprend pas. Il suffit de peu de choses pour se retrouver exclu : des lacets qu’on ne sait pas faire, un pull « trop moche », un Papa « qui ne travaille pas », un frère qui se fait harceler et on se retrouve seul, ignoré. Sans copains ou copines sur qui compter… Dans ce film, où les adultes sont souvent absents et, au mieux, aveugles ou totalement inefficaces, toute la violence de l’école et des relations entre enfants saute aux yeux. Toutes ces règles implicites qu’il faut rapidement intégrer et ce jugement social qui ne tarde pas à tomber, même lorsqu’on n’a que 6 ou 10 ans… Un monde incroyablement dur et hostile qui ne rassurera pas ceux qui ont des enfants dans leur entourage ou qui en côtoient quotidiennement. Mais qui les aidera peut-être à être davantage vigilants et à l’écoute.

Projeté dans la section Un Certain Regard, le premier long métrage de la jeune cinéaste belge a été longuement applaudi, hier à Cannes et a laissé sans voix ceux qui l’ont découvert, en parallèle, ce matin à Bruxelles. Ni fioritures, ni pathos mais une justesse de tous les instants, un grand dépouillement et un énorme respect de ce que vivent les plus jeunes et qu’on qualifie souvent à tort de "gamineries" ou d’"enfantillages". La preuve qu’on peut-être petit et vivre des choses lourdes et graves. Avec beaucoup de tact et de finesse, la réalisatrice montre le double conflit de loyauté dans lequel sa jeune héroïne se retrouve imbriquée et les répercussions importantes que cela entraîne sur son quotidien et sur son entourage. Un film éclairant, âpre mais juste, produit par Dragons Films.


"Un Monde" devrait sortir en salles en Belgique au début du mois d’octobre.

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