“Le Retour” aux origines corses de Catherine Corsini à Cannes
Mercredi soir, au-delà de la polémique, Catherine Corsini dévoilait son film en Compétition du 76e Festival de Cannes. L’histoire d’une mère d’origine sénégalaise et de ses deux filles sur les traces d’un secret de famille corse.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/5fe4e627-8f76-40cd-8b84-1471638c0a7a.png)
Publié le 18-05-2023 à 11h44
:focal(2702x1674:2712x1664)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/UNAJQVQZP5APJCO6P2H4NLNNZ4.jpg)
Avant même l’ouverture du 76e Festival de Cannes, une polémique a éclaté à propos de la sélection en Compétition du Retour, le nouveau film de Catherine Corsini, dévoilé mercredi en fin de soirée. En cause, une série de témoignages anonymes dénonçant le traitement réservé à deux actrices, mais aussi le retrait par le CNC d’une subvention de 680000€ pour une scène de masturbation de l’actrice mineure Esther Gohourou ne figurant pas dans le scénario original et non déclarée par la suite. Une scène coupée au montage, comme ont pu s’en rendre compte les festivaliers… Cela suffira-t-il à éteindre l’incendie ?
En Compétition pour la troisième fois, après La Répétition en 2001 et La Fracture en 2020, Catherine Corsini est une habituée de Cannes. C’est elle qui, en tant que présidente de la Caméra d’or, avait sacré Girl de Lukas Dhont. Bref, la réalisatrice a la carte à Cannes. Ce qui explique sans doute pourquoi, malgré la polémique, Thierry Frémaux ait à ce point tenu à ce que le douzième long métrage de la Française figure en Compétition.

Un été mouvementé
Dans Le Retour, la cinéaste française s’attaque, parfois un peu maladroitement, à un sujet délicat, celui de l’identité d’une famille noire en France. Cette histoire, coécrite avec la jeune scénariste d’origine sénégalaise Naïla Guiguet, c’est pourtant aussi un peu la sienne, puisqu’elle y évoque également ses propres racines corses… L’expérience de Corsini et celle de sa coscénariste s’entremêlent en effet dans Le Retour, qui met en scène le retour en Corse de Khédidja (Aïssatou Diallo Sagna), quinze ans après avoir précipitamment quitté l’île avec ses deux filles.
Débordée par trois jeunes enfants difficiles en vacances, une riche famille parisienne (Virginie Ledoyen et Denis Podalydès) propose à cette assistante maternelle de les rejoindre en vacances sur l’Île de Beauté pour jouer les nounous. Khédidja accepte, à condition de pouvoir emmener avec elle Jessica (Suzy Bemba) et Farah (Esther Gohourou). À 18 ans, l’aînée, très sage, s’apprête à entrer à Sciences Po. À 15 ans, la petite est plus délurée ! Entre remontée des souvenirs, exploration d’un secret familial lié à la mort de leur père corse et premiers émois au soleil, les vacances s’annoncent mouvementées pour les jeunes filles…

Double expérience
Dans le prolongement de La Fracture, Le Retour explore de nouveau une France résolument contemporaine. Identité, racisme, mépris de classe, homosexualité… Autant de thèmes chers à Catherine Corsini. Même si l’on sent peut-être un peu trop le programme politique derrière le film, ainsi que la double expérience de la cinéaste et de sa scénariste sur la construction des personnages. Avec une contradiction difficile à éluder pour le spectateur et d’ailleurs posée explicitement dans le film par la jeune Farah : “Maman, si papa était Corse, pourquoi on est si Noires ?”
Si elle est mis en scène de façon efficace et portée par une vraie sensualité dans la façon de filmer ses comédiennes, si elle bénéficie des superbes paysages corses et de la lumière de Jeanne Lapoirie, cette chronique estivale est surtout portée par trois actrices épatantes. Récompensée du César de la meilleure actrice dans un second rôle en 2022 pour son rôle dans La Fracture, l’aide-soignante Aïssatou Diallo Sagna poursuit joliment sa carrière d’actrice dans le rôle de cette mère-courage. Face à la délicatesse et l’élégance de Suzy Bemba et au tempérament explosif de la jeune Esther Gohourou. Laquelle, par son naturel, emporte tout sur son passage…

Le Retour Chronique estivale Réalisation Catherine Corsini Scénario Catherine Corsini et Naïla Guiguet Photographie Jeanne Lapoirie Montage Frédéric Baillehaiche Avec Aïssatou Diallo Sagna, Suzy Bemba, Esther Gohourou, Virginie Ledoyen, Denis Podalydès, Lomane de Dietrich… Durée 1h50
