À Cannes, Léa Drucker prisonnière d’un désir interdit dans “L’Été dernier” de Catherine Breillat
Ce jeudi soir en Compétition du 76e Festival de Cannes, la cinéaste française a offert un remake du film danois “Queen of Hearts”, avec une Léa Drucker aussi troublante que Trine Dyrholm dans l’original.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/5fe4e627-8f76-40cd-8b84-1471638c0a7a.png)
Publié le 25-05-2023 à 20h15 - Mis à jour le 25-05-2023 à 20h23
:focal(1915x1085:1925x1075)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/CWHAESLRQNGONLB7ABVNMAVCKM.jpg)
Cela fait dix ans qu’on avait plus eu de nouvelles de Catherine Breillat, depuis Abus de faiblesse, avec Isabelle Huppert, dans lequel elle mettait en scène l’escroquerie dont elle avait été victime, au lendemain de son AVC en 2005, par Christophe Rocancourt. Mardi soir à Cannes, la cinéaste était de retour, en Compétition, avec L’Été dernier, nouveau portrait de femme dépendante de ses passions emmené par une formidable Léa Drucker.
Remake de Queen of Hearts de la Danoise May el-Toukhy en 2019, le 14e long métrage de la Française est nettement moins sulfureux et explicite que ses films chocs Romance ou Anatomie de l’Enfer (tous deux avec Rocco Siffredi en 1999 et 2004). Il n’en appartient pas moins pleinement à la filmographie de Breillat qui, film après film, n’a eu de cesse d’interroger le désir féminin. Tandis que, par le sujet qu’il aborde, L’Été dernier reste un film audacieux.

Amours coupables
Avocate respectée, spécialiste des affaires impliquant des mineurs, Anne (Léa Drucker) vit avec Pierre (Olivier Rabourdin), un riche entrepreneur, et leurs deux petites filles adoptives dans une confortable demeure bourgeoise dans la chic banlieue parisienne. L’équilibre de la famille se voit bouleversé quand débarque Théo (Samuel Kircher), le fils de Pierre, renvoyé de son école à Genève. Entre l’ado déphasé et sa belle-mère, l’ambiance est à couteaux tirés. Pourtant, petit à petit, ils se rapprochent. De confidences en taquineries, le trouble naît et jeu de la séduction se met en place. Ces deux-là franchiront-ils la ligne rouge de ce désir interdit ?
Dans le rôle de cette femme mûre irrésistiblement attirée par un corps jeune, Léa Drucker succède donc à Trine Dyrholm. Et comme la Danoise, la Française est juste dans tous les registres, de la douceur à la froideur, en passant par le trouble érotique. Face à un jeune Samuel Kircher agaçant comme il se doit…

Thriller familial intense
Se concentrant sur ses deux personnages – souvent filmés en très gros plans -, n’éludant rien que la réalité de ce qu’ils vivent – sans pourtant sombrer dans un voyeurisme cru à laquelle elle nous a parfois habitués -, Catherine Breillat signe, plus qu’une passion amoureuse, un thriller familial intense. Car, très vite, on se débarrasse de tout jugement moral sur la situation, pour partager ce sentiment d’inquiétude de l’héroïne, cette terreur d’être surprise à tout moment, en risquant de faire voler sa famille en éclats.
Tension constante, personnages joyeusement retors (pour ne pas dire pervers), mise en scène tendue, histoire dérangeante abordée frontalement sans aucun jugement moral… L’Été dernier montre qu’à 74 ans, Breillat n’a rien perdu de l’originalité de son regard sur le désir féminin.
L’Été dernier Thriller familial De Catherine Corsini Scénario Catherine Corsini et Pascal Bonitzer (d’après le film Queen of Hearts) Photographie Jeanne Lapoirie Montage François Quiqueré Avec Léa Drucker, Samuel Kircher, Olivier Rabourdin, Clotilde Courau… Durée 1h44
