Les journaux s'autodétruisent inexorablement
Publié le 15-07-2004 à 00h00
FOCUS
D ans les 25 ans à venir, un tiers de nos millions de journaux risquent de disparaître!» En cause: la désagrégation du papier. C'est le noir constat dressé par Marc D'Hoore, responsable de la section des journaux à la Bibliothèque royale.
La conservation de ce patrimoine constitue un énorme défi, dû à trois spécificités: «la masse de documents, leur fragilité, et la demande élevée de consultation». Deux mille titres de journaux belges (du 18e au 21e siècle) et 500 titres étrangers, essentiellement quotidiens, reliés en millions de volumes, occupent 5,5 kilomètres de rayonnages dans les sous-sols. Les conditions de conservation dans ces magasins et les règles de manipulation en salle de lecture, ne peuvent que retarder «l'inévitable échéance, due à la médiocre qualité du papier fabriqué à partir de pâte de bois depuis 1860.» Il s'acidifie, devient orangé, friable, avant de tomber en miettes. «Il s'autodétruit ». Or, les journaux sont, de surcroît, très demandés pour la consultation, vu la quantité et la variété d'informations qu'ils contiennent. «La section attire 8000 lecteurs par an, pour des motifs allant de l'étude d'un journal particulier, un travail en sciences sociales, en climatologie... à une recherche purement utilitaire, que ce soit dans le cadre d'une enquête de police, la copie d'une «Une» pour un anniversaire, une recherche personnelle, etc.»
Il y a donc urgence. La préservation de l'original est inimaginable: la désacidification du papier est hors de prix. Reste, explique Marc D'Hoore, la solution du transfert sur un autre support: microfilm (photographie des pages) ou numérique. C'est en fait la combinaison des deux méthodes qui est envisagée: numériser les microfilms. Ceux-ci, utilisés depuis 30 ans dans la section - 10 pc des titres sont microfilmés à ce jour -, ont une durée de vie élevée: le microfilm «mère» vivrait 200 à 500 ans. Le numérique offre ensuite d'autres avantages: confort de consultation, recherche par mot dans le texte, diffusion large (Internet)...
Le plan fédéral permettra donc d'intensifier le microfilmage des journaux et, parallèlement, d'entamer la numérisation. Priorité aux journaux fragiles (période 1860-1950) et rares. Le «catalogue informatisé des collections de journaux belges» à venir, fruit d'une collaboration entre toutes les institutions possédant des collections, permettra, précisément, de repérer un titre dont il ne subsiste qu'un ou deux exemplaire (s).
© La Libre Belgique 2004