L’ultime tome de "Mélopée d’Anatole Atlas"

Au fur et à mesure de son édification chez différents éditeurs, nous avons attiré l’attention sur la saga romanesque de Jean-Louis Lippert ayant pour titre global "Mélopée d’Anatole Atlas, aède, athlète, anachorète". Son septième et ultime tome, "Ajiaco", se présente sous forme d’un imposant volume qu’habille une couverture de cuir et qui, pour l’écrivain belge, se veut le réceptacle de toutes les substances que la tradition littéraire nous a fait parvenir et "l’invention d’une recette perpétuant l’idéal de la chair faite verbe comme nourriture de vie." Le mot-titre désigne la marmite où bout le pot-au-feu chez les Indiens caraïbes (en quoi "maints écrivains cubains virent une métaphore de leur culture créolisée"). Pour le lyrique auteur de "Pleine lune sur l’existence du jeune bougre" (Messidor, 1990) et de "Tombeau de l’aède" (Luce Wilquin, 2005) dont l’œuvre relève non seulement du chant mais aussi de la transe et de la danse, "l’écriture véritable résulte moins d’une aptitude à déchiffrer les motifs enchevêtrés dans le tapis de l’existence, qu’elle ne réside en l’art d’interpréter les signes tracés par la poussière des cadavres dissimulés sous ce tapis. C’est dire si, à chaque époque, l’œuvre ayant vocation de franchir les siècles ne se réduit jamais aux imageries officielles, non plus qu’elle ne s’inféode aux formes convenues, convenables et conventionnelles de son temps".

Fr.M.

Au fur et à mesure de son édification chez différents éditeurs, nous avons attiré l’attention sur la saga romanesque de Jean-Louis Lippert ayant pour titre global "Mélopée d’Anatole Atlas, aède, athlète, anachorète". Son septième et ultime tome, "Ajiaco", se présente sous forme d’un imposant volume qu’habille une couverture de cuir et qui, pour l’écrivain belge, se veut le réceptacle de toutes les substances que la tradition littéraire nous a fait parvenir et "l’invention d’une recette perpétuant l’idéal de la chair faite verbe comme nourriture de vie." Le mot-titre désigne la marmite où bout le pot-au-feu chez les Indiens caraïbes (en quoi "maints écrivains cubains virent une métaphore de leur culture créolisée"). Pour le lyrique auteur de "Pleine lune sur l’existence du jeune bougre" (Messidor, 1990) et de "Tombeau de l’aède" (Luce Wilquin, 2005) dont l’œuvre relève non seulement du chant mais aussi de la transe et de la danse, "l’écriture véritable résulte moins d’une aptitude à déchiffrer les motifs enchevêtrés dans le tapis de l’existence, qu’elle ne réside en l’art d’interpréter les signes tracés par la poussière des cadavres dissimulés sous ce tapis. C’est dire si, à chaque époque, l’œuvre ayant vocation de franchir les siècles ne se réduit jamais aux imageries officielles, non plus qu’elle ne s’inféode aux formes convenues, convenables et conventionnelles de son temps".

Telle apparaît la "profession de foi" du franc-tireur auteur de "Tango tabou de l’Ombu" dont, dans cette fresque, ne s’est pas démenti le projet d’"un roman de chevalerie cosmique ayant pour Graal rien moins que l’utopique - et nostalgique - réconciliation d’une humanité libérée de ses humiliations millénaires". Jean-Louis Lippert (Stanleyville, 16 décembre 1951) rappelle qu’Atlas relie la terre au ciel : "Advient-il que cette figure mythique s’incarne sous la forme d’un aède grec lesté d’une mémoire homéri que ? Le texte qui s’en tisse crée un réseau de sens apte à défier la Toile électronique. A cet ordre binaire se substitue, par la grâce d’une descente aux enfers, l’hypothèse d’une trinité réinsufflant le chant de l’âme universelle entre les couples séparés de la foi et de la raison comme de l’esprit et de la matière". Et Jean-Louis Lippert de s’interroger : se pourrait-il que, d’Homère à James Joyce, entre vie et mort, songe et réalité, nous soit offerte une même prière de salut ? L’auteur de l’"Odyssée" se joint ici à celui de "Ulysse" pour, "depuis le royaume des ombres", mener enquête sur "l’assassinat de l’instance poétique au cœur d’une Europe en proie aux convulsions de sa propre mémoire". Pour le romancier de "Dialogue des oiseaux du phare" et de "Confession d’un homme en trop" - qui refuse de jouer un rôle conforme à la norme et revendique une esthétique du séisme - se pose la question : "Qu’adviendrait-il si le Vieux continent se rappelait du fait qu’il dispose d’une autre médiation que sa monnaie ?" C’est ce dont nous avertit ce livre, se voulant "une voyance mythique non moins qu’historique aux lumières cosmiques, politiques et quelquefois psychologiques". Pour Jean-Louis Lippert, un spectre hante la littérature : "le spectre de l’aède."

Rens.: www.sphérisme.be

Ajiaco Jean-Louis Lippert Editions Miroir Sphérique 724 pp., env. 99 €

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