Mario Ramos était le plus fort
La nouvelle de la disparition de ce grand auteur illustrateur belge vient de tomber et risque d’attrister de très nombreux enfants auprès desquels il avait un immense succès.
Publié le 18-12-2012 à 18h51 - Mis à jour le 18-12-2012 à 22h31
:focal(115x89:125x79)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/ZE6DI3PPWREHHHAW6BXHIHEFMI.jpg)
"Je suis né à Bruxelles, en 1958, de mère belge et de père portugais. Mon enfance est rythmée par les séjours chez ma grand-mère à l’orée du bois, et les vacances au soleil au Portugal.” Voilà ce qu’on peut lire sur le site officiel de Mario Ramos qui nous souhaite la bienvenue mais qui a oublié de nous dire au-revoir. La nouvelle de la disparition de ce grand auteur illustrateur belge vient de tomber et risque d’attrister de très nombreux enfants auprès desquels il avait un immense succès. Pour eux, c’est sûr, il était “Le plus fort”. Tous ont dévoré ses albums, édités chez Pastel, “Quand j’étais petit” (1997), “Le roi est occupé” (1998), “Un monde de cochons” (2005) ou encore “Le monde à l’envers” (1995).
Les petits se sentaient compris par cet artiste, sensible et engagé. Les parents aussi car il y avait toujours une double lecture, un engagement, un regard aiguisé sur le monde, la politique, notre société. Mario Ramos aimait chatouiller là où ça dérange. Les cochons et les loups, ou les humains que nous sommes, en prenaient pour leur grade ! Et l’on disait volontiers de lui qu’il était en Belgique la vedette de la littérature jeunesse. Son talent était aussi reconnu à l’étranger et chacun de ses livres, traduits dans une vingtaine de langues. Avec son air de grand adolescent, son calme apparent et son légitime besoin de reconnaissance, il prônait toujours la différence et le respect.
Mario Ramos prenait, par ses crayons, la défense des plus faibles et lorsqu’il publia “C’est moi le plus fort”(2001), son best-seller, Prix Versele en 2003, chacun devinait le clin d’œil qui se cachait derrière un titre aussi provocateur. Sans imaginer pour autant la fin de l’histoire tant il avait le sens de la chute. “Pour moi, la chute est très importante car d’elle dépend le souvenir qu’on gardera du livre”, nous confiait-il en l’an 2000, un an avant le 11 septembre, un événement qui le marqua tant qu’il jeta sa télévision ensuite. Le voici donc qui nous surprend à nouveau mais cette fois, il ne nous fait plus du tout sourire. Comment imaginer une rentrée littéraire sans y découvrir, avec un bonheur sans cesse renouvelé, le nouveau Ramos qui aura bel et bien été “Le plus beau” (2006) et “Le plus malin” (2001) comme il le titrait encore en 2011, un de ses derniers albums dans lequel il revisite “Le Petit Chaperon rouge” et croque à nouveau le loup, cet animal omniprésent dans son œuvre, et pour lequel il semblait nourrir un mélange de tendresse et de férocité ? Deux sentiments perceptibles dans ses aquarelles nerveuses et généreuses.
Optimiste désespéré
Lors de notre première rencontre, dans son atelier schaerbeekois, il s’était lui-même présenté comme un optimiste désespéré, un enfant doux, calme et rêveur, ennemi du ballon rond et souvent sujet aux moqueries dans la cour de récré. Graphiste formé à La Cambre, illustrateur de presse, notamment pour La Libre, il est venu à la littérature jeunesse grâce à Hergé, Tomi Ungerer et Saul Steinberg, père de tous les dessinateurs. Il ne se consacra réellement au livre pour enfants qu’à l’âge de quarante ans et publia une trentaine de livres. Il ne connaissait pas l’angoisse de la page blanche mais celle de la mise au net qui représentait pour lui “une réelle souffrance car alors, je sais que l’aventure s’achève et que je n’y ai peut-être pas mis tous ce que je voulais mais tout ce que je pouvais”, nous confiait-il également, lui qui rencontrait très souvent les enfants tant leur contact lui importait.
Réactions
Suite à l’annonce de sa disparition, les réactions fusent. De la part de Pastel, sa maison d’édition : “Mario était curieux de tout, généreux, talentueux et très fidèle. Ses loups, cochons, singes, crocodiles et autres petits lardons sont chargés de toutes les émotions. Il va nous manquer énormément”. Et de l’auteur français François Place qui salue ses albums, “des histoires toutes simples, à belle hauteur d’enfance, des albums pour faire peur et pour faire rire, des albums pour apprivoiser les petites misères et les grands chagrins… Des albums à tenir très fort entre ses bras, comme on voudrait tant pouvoir le faire avec toi, Mario.”