Danse avec les étoiles

Plus de cent livres et l’inspiration intacte, c’est du Sfar. Si girly dans le trait, les couleurs et, surtout, les attitudes, c’est du Bagieu.

Milecan Gilles
Danse avec les étoiles

Il n’est pas de terrain sur lequel Joann Sfar n’ose s’aventurer. Prolifique auteur (plus de cent bandes dessinées publiées depuis son premier livre en 1994), le Niçois (de Paris) aime, plus encore que de s’y essayer, mêler les genres. Il confronte leurs codes, règles, trucs et ficelles respectifs avec malice. Des ressorts souvent inattendus s’offrent ainsi aux histoires qu’il couche sur papier.

Sfar expérimente, Sfar tente, Sfar ose. Ce n’est pas toujours réussi, mais ça l’est dans une énorme majorité des cas.

C’est bien simple, dans la BD actuelle, Sfar est incontournable.

Si Joann Sfar est une star, sa nouvelle comparse, Pénélope Bagieu, l’est également. Les succès de sa "Joséphine, la trentaine, pas mariée, pas d’enfant, un chat" et de "Ma vie est tout à fait fascinante" ne se démentent pas.

L’adaptation cinématographique, sortie en salle en juin dernier avec Marilou Berry dans le rôle-titre, n’a pas décollé. Soit. La jeune Parisienne ne s’était pas impliquée dans le travail d’adaptation, "pas intéressée par ce travail" et trop occupée à produire de nouveaux livres, disait-elle au "Figaro" en novembre 2012.

"Stars of the Stars" était, à l’époque, en gestation. Introduit comme une émission de télé-réalité (l’école de danse la plus célèbre du monde a convoqué sept filles pour une audition), le récit bascule dès la deuxième page dans l’aventure extraterrestre. Jugée depuis l’espace, la Terre ne présente aucun intérêt. Sa destruction faciliterait les trajets commerciaux entre les différentes planètes de l’univers. Jusque-là, les peuples des univers connus s’accordaient pour ne pas la réduire en cendres par respect pour la danse. Mais, en temps de crise, le sentimentalisme a peu de place. Pendant que les danseuses livrent des prestations et des traits de caractère inconciliables, un impatient extorque les codes d’atomisation.

Le compte à rebours est lancé. Dans l’immeuble de "Stars of the Stars", celui-ci résonne.

Le bâtiment décolle à temps. Se referme alors un huis clos sur une dizaine de personnalités dont certaines sont particulièrement surprenantes. Les angoisses, névroses, frustrations macèrent. Les oppositions ne prennent pas de détours. Le tout, dans cette ambiance délicieusement et férocement girly que rend si bien le dessin de Pénélope Bagieu. L’album s’achève sur un cliffhanger * dont Sfar détient le secret. Vite le tome suivant !

Gilles Milecan

* Expression anglophone désignant une fin ouverte créant un fort suspense.

Stars of the Stars - 1 Joann Sfar et Pénélope Bagieu Gallimard 48 pp. en coul., env. 14 €. En librairie le 5 septembre

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