Fred duBus, la fine gâchette

"Trous de balles", le nouveau florilège du génial caricaturiste belge.

Eric de Bellefroid

"Trous de balles", le nouveau florilège du génial caricaturiste belge.Frédéric duBus, par excellence, est un homme sans strass ni paillettes. Les lecteurs de notre journal ont appris à aimer cette figure discrète qui signe chaque jour dans ces colonnes un dessin commun à "La Dernière Heure" (DH), où le talent dès l’abord saute aux yeux. Où l’audace, en particulier, le dispute à un dégoût de la provocation gratuite. Et, il va de soi, de toute vulgarité.

En quoi, il ne s’est jamais senti appartenir, comme un petit frère, à la famille décimée des Cabu, Wolinski, Charb, Honoré et Tignous, sauvagement abattus dans les locaux de "Charlie Hebdo" le 7 janvier dernier. Par rapport à eux, il pense "plutôt jouer de la flûte que du heavy metal". Chez "Charlie", regrette-t-il, le rire était une arme offensive. Lui, de son côté, a choisi l’arme de défense.

Le balcon effondré

Il a détesté ensuite ces moments où les caricaturistes ont été portés en première ligne. "Je faisais un métier de lâche, sur mon balcon, et puis soudain, du jour au lendemain nous avons été promus fantassins de la démocratie. Mon balcon est tombé dans la rue." Ce n’est pas exactement le style d’une personnalité qui n’affectionne pas particulièrement les premières loges, surexposées.

Né le 11 novembre 1963 à Bruxelles, élève du collège Saint-Pierre, avant d’étudier l’illustration à l’institut Saint-Luc, duBus avait contracté le virus du dessin dès l’enfance, en classe notamment. Au milieu de quoi s’élevait à ses yeux, dans le journal satirique "Pan" du temps de sa splendeur, un véritable "dieu vivant". C’était Alidor (Paul Jamin), son maître vénéré qui, en l’adoubant comme son fils spirituel, lui a sans doute transmis tout ou partie de son trait affûté, ciselé, d’une précision chirurgicale. "Et le sens du petit détail qui tue", de la caricole à la baraque à frites. Ou, comme lui aussi, ce goût de la grande fresque - très bande dessinée - où se compromettent volontiers nos héros politiques.

Un djihadisme décérébré

L’année 2015 s’étant à peu près terminée, le vendredi 13 novembre, comme elle avait débuté, l’aventure de la coalition politique dite "suédoise", pilotée par un Premier ministre francophone à la botte de la N-VA de Bart De Wever et renvoyant sagement le Parti socialiste dans l’opposition, est donc ici largement parasitée par l’âcre et sanglante fumée des kalachnikovs d’un djihadisme décérébré. C’est bien pourquoi Fred duBus a parachevé d’un nouveau trait de génie le recueil fleuri d’une première année sécuritaire, en l’intitulant comme de juste "Trous de balles".Eric de Bellefroid

Trous de balles, duBus, Renaissance du livre, 15,90 €

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