Hergé, du Brussels Vloms aux parlers dérivés
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/453e8700-1cbe-41e1-ad18-bdfa91a560ca.png)
Publié le 29-05-2018 à 16h00
Jean-Jacques De Gheyndt a revisité minutieusement l’œuvre du dessinateur.Jean-Jacques De Gheyndt est docteur en sciences de l’ULB mais ce Bruxellois a bien d’autres atouts et talents dans sa besace.
Profondément attaché à sa ville et à ses habitants et surtout à leurs parlers, il a livré, voici deux ans, une remarquable étude sur les langues endogènes dans la capitale de la Belgique.
Une approche qui est allée bien au-delà des clichés, (dé)montrant par ailleurs son grand attachement à ses concitoyens qui, Dieu merci (pour ceux qui croient à la Révélation !), brillent par une belle diversité culturelle. Car n’en déplaise aux plus francophonissimes et aux plus flamingants, Bruxelles ne se limite pas sur le plan linguistico-culturel au beau français et à l’Algemeen beschaafd nederlands. Au contraire, à côté de tous les idiomes plus ou moins exotiques qu’on y pratique, elle offre encore aussi une belle panoplie de parlers du cru bien au-delà aussi du seul "Beulemans".
Un de ses plus illustres ambassadeurs culturels, Hergé, a eu son existence bercée, pour ne pas dire marquée, par ce "Babel de babbeleires". Et il a eu le coup de génie d’en émailler son œuvre à la fois dans les noms de lieux mais aussi dans les langues des pays imaginaires qui traversent sa création fertile.
Inouï : le "Brussels vloms" du papa de Tintin se retrouve, et comment !, dans le syldave, le bordure, le bibaro et l’arumbaya qui surgissent au détour des albums. Une belle manière de rendre ses lettres de noblesse à nos spécificités culturelles alors que les aventures de Tintin et Milou ont été traduites dans plus de 80 langues et encore dans une trentaine de parlers plus locaux ou régionaux.
Il y a, certes, déjà eu des études très sérieuses sur le sujet mais Jean-Jacques De Gheyndt a voulu systématiquement relever toutes les présences et allusions dans l’œuvre écrite mais aussi dans certains dessins animés mettant en scène Tintin. Une relecture systématique qui dévoile encore bien des aspects inédits y compris aux "tintinophiles" les plus aguerris.
Incontestablement de la belle ouvrage et un bon ouvrage où notre chercheur ès-brussels vloms a poussé le souci de la précision jusqu’à donner moult détails où on se rend compte qu’il n’y a pas loin de la fertile créativité d’Hergé aux réalités historiques. Le tout toujours mâtiné de l’humour des "echte Brusseleires" qui savent aussi rire d’eux-mêmes comme on dit encore sur "l’Aa mèt", le "Vosseplaain" ou autre "Looizemèt", en fait la place du Jeu de balle, ce "Hirsch-par-terre" par contraste avec le magasin de vêtements de luxe Hirsch qui se trouvait près de la rue Neuve…
Voilà une Encyclopédie du bruxellois dans les aventures de Tintin qui passionnera les "accros" du petit reporter comme les amoureux de Bruxelles… Un livre dans lequel on reste pendant un bon bout de temps. A la manière de son titre : quand j’y suis, j’y reste…
Eï ben ek, eï blaaivek. Bruxellois/Sydave/Arumbaya Jean-Jacques De Gheyndt Editions Bernardiennes 213 pp., env. 16 €