L'amour toxique de sa mère
Dans L’effet maternel, Virginie Linhart raconte sa relation très fusionnelle mais névrotique avec sa mère, une femme splendide, brillante biophysicienne, mais, à lire le récit de sa fille, totalement hystérique et autocentrée.
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Publié le 31-01-2020 à 13h40 - Mis à jour le 31-01-2020 à 14h52
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Virginie Linhart raconte sa relation impossible avec sa mère. Comment arrêter la transmission de cette névrose ? Virginie Linhart se penche sur l’amour maternel. Réalisatrice de nombreux documentaires remarqués (dont l’un sur Françoise Dolto) elle est aussi l’auteure de plusieurs récits dans lesquels elle revient sur son père Robert Linhart et d’autres leaders de Mai 68 qui travaillaient alors en usine (Volontaires pour l’usine. Vies d’établis) et sur le quasi mutisme dans lequel cet intellectuel militant d’extrême gauche est tombé en 1981 (Le Jour où mon père s’est tu).
Dans L’effet maternel, elle raconte sa relation très fusionnelle mais névrotique avec sa mère, une femme splendide, brillante biophysicienne, mais, à lire le récit de sa fille, totalement hystérique et autocentrée.
Certes, il n’existe pas de "bonne mère" mais par contre l’amour maternel peut parfois s’avérer toxique.
Virginie Linhart est l’enfant d’un couple marqué par Mai 68 et la vague libertaire. Une "femme qui brandissait haut et fort sa liberté sexuelle, son mépris des conventions, nous stupéfiant, nous ses enfants."
"Elle qui aime tant séduire, surtout les hommes plus jeunes qu’elle, lit-on, n’est pas préparée à vivre avec une fille adolescente qui la vieillit immanquablement. À mon corps défendant, je suis prise dans une relation de rivalité et de jalousie qui me terrifie."
Enceinte de jumeaux
C’est peu dire que la mère laisse peu de place à la fille. Elles en arrivent même à partager, l’une après l’autre, le même amant pour l’inviter à investir avec elles une maison de campagne qui sera à la fois le paradis et l’enfer.
Virginie Linhart se sent comme dépossédée d’elle-même entre tous ces poids du passé qui pèsent sur elle : "le mutisme de mon père, la toute puissance de ma mère et les ravages de la Shoah sur mes grands-parents."
Le problème surgit surtout quand elle tombe enceinte, et de surcroît de jumeaux. Mais même là, la mère exerce son emprise et vient concurrencer sa fille en décidant d’adopter, elle-même, un bébé. Et à sa fille délaissée par le père de ses enfants, elle renvoie sèchement : "tu n’avais qu’à avorter, il n’en voulait pas de cette gosse."
Sa question est alors comment éviter que cette névrose familiale venue de la Shoah, des effets de Mai 68 et d’une mère surpuissante, ne vienne perturber à son tour sa fille joliment appelée Lune.
La solution est l’arrivée d’un homme, Paul, qui vient couper symboliquement cette chaîne maternelle. L’autre volet de sa guérison possible est l’écriture : "À travers ce récit, écrit-elle, j’ai le sentiment non seulement de reprendre en mains les cartes de ma destinée, mais aussi de comprendre l’entremêlement entre une époque et une famille, d’introduire du collectif dans un parcours singulier."
Grâce à cela, conclut-elle avec force : "l’effet maternel ne touchera pas les descendants des descendants".
L’effet maternel Récit De Virginie Linhart, Flammarion, 215 pp. Prix env. 19 €
