Giulia Foïs raconte son douloureux parcours de fille violée : "la Bête immonde, il faut la regarder en face"
Dans un récit acide et percutant, Giulia Foïs raconte le douloureux parcours d’une fille violée : elle.
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Publié le 06-03-2020 à 15h46 - Mis à jour le 06-03-2020 à 17h25
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Dans un récit acide et percutant, Giulia Foïs raconte le douloureux parcours d’une fille violée : elle.
Elle avait vingt ans, la vie devant elle et, cet été-là, elle était hôtesse d’accueil au Festival d’Avignon. Souriante et sociable - elle dit sa "volubilité congénitale" qui "la ferait beaucoup rigoler, même avec une plante en pot" -, Giulia Foïs, ce soir-là, celui du 24 juillet, quitte ses amis et le cœur de la ville pour aller récupérer sa voiture qui est garée de l’autre côté des remparts. Un homme s’approche, il prétend être en galère : on lui a volé sa voiture, peut-elle le conduire au commisariat ? Elle dit oui. Il monte. Le prédateur est dans la place et la vie de Giulia vient de basculer…
Tabassée, menacée d’un cutter, elle va être violée, réduite en miettes, détruite au-dedans quand le dehors n’affiche pas assez de stigmates au goût des gendarmes qui prennent sa plainte. "Dommage, elle est même pas défigurée", dira le commissaire.
Giulia n’est pas la bonne victime pourtant, comme elle l’écrit - et la phrase est mise en exergue, sur la couverture, elle a eu de la chance, elle a "eu le bon viol". Celui qu’en toute objectivité - c’est en tout cas ce qu’elle croit -, on ne pourra l’accuser d’avoir provoqué. Ce soir-là, il était 21 h 30, elle était sur un parking, elle portait un pantalon. Il avait une arme et une lacrymo. "On peut donc raisonnablement penser que je n’étais pas d’accord, que je ne cherchais pas les ennuis", dit-elle. De plus, elle ne connaissait pas son agresseur et en aucun cas, donc, il n’aurait pu lui être reproché de l’avoir un peu séduit, d’avoir joué au jeu du flirt.
Et pourtant, au terme de trois longues années d’attente, le verdict du procès est sans appel : acquitté. "Si je n’étais pas la bonne victime, il n’était pas le bon violeur non plus, écrit-elle. Un bon contribuable, blanc et footeux, ça rentre pas dans la case." Et de rappeler qu’en France, un viol, "ça arrive très exactement toutes les sept minutes".
Pour écrire son récit, acide et percutant, Giulia Foïs a fouillé au fond de sa mémoire, gratté la plaie et regardé dedans. "Parce que la Bête immonde, on lui nique sa race quand on la regarde en face", écrit-elle encore, dans une langue directe, franche et terriblement actuelle. De celle qui, elle l’espère - et nous avec elle - arrivera aux oreilles de toutes celles qui ont vécu ou vivent ce qu’elle a traversé voici vingt ans. "Je ne dis plus ‘Je me suis fait violer’ mais ‘J’ai été violée’, dit-elle . Parce que je n’y suis pour rien. J’ai mis du temps, mais aujourd’hui, je le sais."
Giulia Foïs, Je suis une sur deux, Flammarion