Sophie Chauveau, avant Vanessa Springora
Il y a tout juste un an paraissait Le Consentement (qui vient d’être réédité au Livre de poche), dans lequel Vanessa Springora témoignait du comportement pédophile de l’écrivain français Gabriel Matzneff.
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Publié le 20-01-2021 à 12h15 - Mis à jour le 20-01-2021 à 15h30
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Il y a tout juste un an paraissait Le Consentement (qui vient d’être réédité au Livre de poche), dans lequel Vanessa Springora témoignait du comportement pédophile de l’écrivain français Gabriel Matzneff. Avant elle, il y eut notamment la prise d’écriture de Sophie Chauveau qui, en 2016, a signé La Fabrique des pervers (Gallimard, puis Folio). Elle l’avait rencontré à l’âge de 13 ans, quand lui en avait 50. Plus de trente ans après les faits, l’auteure dépeignait la manipulation psychique et l’emprise subies. Avant elle, il y eut notamment la prise d’écriture de Sophie Chauveau qui, en 2016, a signé La Fabrique des pervers (Gallimard, puis Folio).
S’y déployait l’histoire d’une famille hors norme qui, sur trois générations, a inscrit l’inceste en sa matrice avec une désinvolture effarante. Écartelé entre la beauté de la forme - mots rigoureusement pesés, excellence du vocabulaire - et l’ignominie des faits rapportés, on était saisi d’effroi. Aidée par les révélations d’une cousine, l’essayiste et romancière Sophie Chauveau apprend un jour qu’elle n’est pas la seule à avoir été la victime d’un père, d’un oncle, d’un parrain. Elle décide alors de dresser l’inventaire des enfances piétinées et des bourreaux impunis de sa famille. "Enquêter, donc. Et se cogner à l’amnésie générale, aux déformations hagiographiques du passé, aux dénis en tout genre, et surtout aux reconstitutions dévaluant les victimes, les ravalant au rang d’affabulatrices mythomanes."
Son livre était le fruit de ce patient et nécessaire travail. Ayant décrypté le mode de fonctionnement de sa famille, elle indiquait les pistes qui l’avaient aidée à penser les abus qui l’ont détruite, à panser l’irrémédiable, à apporter quelque consolation à l’enfant qu’elle fut. Du silence que s’imposent les victimes à l’amnésie traumatique, les mémoires se réveillent le plus souvent au-delà de la prescription des faits. Aussi Sophie Chauveau a-t-elle écrit pour stopper la malédiction qui pèse sur les siens. Et pour celles et ceux qui, n’ayant pu ou su trouver les mots, se débattent trop souvent seuls avec les séquelles de ce crime sans cadavre.