Ukraine et Russie: le constat d’un gouffre qui se creuse
Anna Colin Lebedev, chercheuse française "d’origine soviétique", comme elle aime se présenter, s’attache à déconstruire le mythe des "frères" slaves.
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- Publié le 17-09-2022 à 18h59
- Mis à jour le 18-09-2022 à 08h10
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On ne connaît que trop bien les assertions de Vladimir Poutine définissant les Russes et les Ukrainiens (et les Biélorusses dans le même élan) des composantes "d’un seul peuple". Un discours qui a justifié la guerre contre l’Ukraine depuis 2014 et l’invasion du 24 février. Un propos qui résonne aussi dans nos projections mentales sur ces pays, somme toute peu connus. Cette rhétorique recoupe-t-elle cependant une quelconque réalité historique ? Anna Colin Lebedev, chercheuse française "d’origine soviétique", comme elle aime se présenter, s’attache à déconstruire le mythe des "frères" slaves.
Pour ce faire, la maîtresse de conférences en sciences politique use de la rigueur académique, de la précision et de la pédagogie qui caractérisent son travail de terrain et son observation des sociétés post-soviétiques depuis plus d'une dizaine d'années. Anna Colin Lebedev approfondit des thèmes qu'elle a explorés dans de nombreuses publications sur son compte Twitter - ses plus de 67 000 followers la consacrant comme l'une des expertes les plus fiables depuis le choc du 24 février. Sans parti pris ni compromis, Jamais frères décrypte les similarités entre les sociétés russe et ukrainienne, le poids des traumatismes du XXe siècle et les trajectoires de plus en plus divergentes que les deux pays ont suivi depuis 1991.
Rapport à l'histoire, au pouvoir, à la langue… tout est passé au crible et on ne peut que regretter que l'auteure ne remonte pas plus loin que le XXe siècle. L'analyse permet de présenter Russes et Ukrainiens dans un effet de miroir et préserve ainsi un équilibre dans la lecture de leurs relations souvent conflictuelles. "Aucun livre ne suffira à combler ce gouffre et à panser l'immense blessure de la guerre", explique Anna Colin Lebedev. "Ce texte se veut cependant un pas dans une direction essentielle : ne pas renoncer à connaître et comprendre l'autre." Une démarche aussi difficile qu'importante.
