Louis Mettewie, le Molenbeekois qui inventa un vélo pliable et une voiture électrique il y a plus d'un siècle
L’historienne Anne Morelli dirige un ouvrage consacré à Louis Mettewie, "bourgmestre visionnaire" de Molenbeek de 1914 à 1938.
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Publié le 27-01-2023 à 17h39
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Pour qui s'intéresse à l'histoire de Bruxelles, voici un ouvrage passionnant. Consacré à un "super-kastar" (comme l'appelait l'hebdomadaire Pourquoi Pas ?, en référence à sa force de travail), l'ouvrage collectif dirigé par l'historienne Anne Morelli s'attache à la personne et aux œuvres du bourgmestre de Molenbeek Louis Mettewie.
Né en 1859 dans une famille modeste, mort en 1942, Louis Mettewie est un "personnage aux mille facettes", écrit l'historienne en introduction. "À côté d'une très longue carrière mayorale, [il fut en effet] un militant du suffrage universel, un entrepreneur audacieux, un laïque et un franc-maçon". Bref : "un libéral de gauche, un progressiste" qui marquera l'histoire de Molenbeek, de Bruxelles et de la Belgique. Le boulevard de la capitale, qui porte son nom, en est encore un témoignage.
Le vélo de l’armée belge
Une date charnière de la vie de Louis Mettewie est sans doute celle du 5 décembre 1892. Ce jour-là, le futur bourgmestre est congédié du ministère de la Guerre pour lequel il travaille en tant qu'employé civil. Il ne pouvait, argumente alors le ministre catholique Charles Pontus, prendre part comme il le faisait à la vie politique, notamment dans la lutte pour le suffrage universel. Louis Mettewie tournera cette révocation à son avantage, écrivent Pascal Majérus et Savinien Peeters. "Il n'hésite pas à faire mention de ce licenciement sur sa carte de visite ! Le voilà champion de la libre parole." Surtout, le Molenbeekois a désormais davantage de temps pour se consacrer à ses activités industrielles. "Il se tourne tout naturellement vers un domaine qui a alors la faveur de la bourgeoisie libérale à laquelle il appartient : la bicyclette."
Les quelques paragraphes qui dépeignent le Bruxelles de la fin du XIXe valent le détour. On s'y croirait. Vélodromes, estaminets pour cyclistes et pistes cyclables se multiplient. Au côté de son frère Joseph, Louis Mettewie lance alors le vélo Belgica, d'abord pliant, qui sera adopté comme véhicule militaire par l'armée belge. Du vélo, les frères Mettewie se lanceront aussi dans la fabrication et la vente des voitures Belgica, dont les premiers modèles furent électriques et qui gagneront en renommée notamment grâce au premier salon de l'auto à Bruxelles en 1902, créé par… Louis Mettewie. Entrepreneur progressiste et conscient des enjeux sociaux, "il n'aura de cesse de stimuler des regroupements d'industriels belges et leur presse et de pousser, avec le conseiller communal libéral Jean Dubrucq, pour que Bruxelles soit dotée d'un véritable port", écrit Anne Morelli.
Du stade à l’église
C’est aussi en tant que bourgmestre (1914-1938) que le "Super-kastar" marquera les esprits. Louis Mettewie modernise et assainit grandement Molenbeek. Au nom de la santé publique, de la cohésion sociale, du développement urbain et de sa notoriété, il y développe notamment le sport à l’école, soutient la création d’infrastructures et d’évènements sportifs. Initié à la loge maçonnique "Les Amis Philanthropes", il défend pourtant la nécessité de doter Molenbeek d’une nouvelle église, l’actuelle église Saint-Jean-Baptiste, qui sera construite en matériaux modernes et dans le style Art Déco.
À la fois réformateur et enfant de son temps, Louis Mettewie offre à travers son histoire (et cet ouvrage) de découvrir et considérer une époque cruciale dans l’histoire de la Belgique.
--> ★ ★ ★ Louis Mettewie, bien plus qu'un boulevard. Un bourgmestre visionnaire à Molenbeek | Essai | Anne Morelli (dir.), Éditions Couleur livres, 176 pp., 19 €
EXTRAIT
"[A la fin du XIXe] la commune est 'maudite': on doit y déplorer un nombre dramatique d'habitants victimes du choléra, de la rage - dont la transmission est due aux chiens errants - et du typhus."