Red Creek Shuffle : polar déjanté, S-F et dérision au programme
Un récit surprenant qui rend aussi hommage à quelques stars du 9e art.
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Publié le 02-04-2023 à 12h03
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Un album qui a le goût du polar, les atours du polar et qui est un polar… mais pas seulement.
Un trou perdu en Arizona, dans le désert de Sonora, à la fin des années 50. Le genre d’endroit qui aurait pu servir de décor au tournage du film Bagdad café. Un coin paumé, poussiéreux, abandonné de tous, ou presque. Car on y trouve pas mal de “natives”, les descendants des fiers indiens qui peuplaient les plaines et qui, à l’époque du récit, sont “parqués” dans ces endroits miséreux. Il y a aussi une petite ville, piquée de quelques petites enseignes, un petit snack, sa patronne au caractère bien trempé mais au cœur tendre, sa serveuse trop jolie et des clients qui n’ont d’yeux que pour elle. Il y a aussi le shérif et son adjoint, une casse de voitures peuplée de frangins qui en rappellent d’autres et une base militaire trop discrète pour être tout à fait honnête.
Dans ce bout du monde, les disparitions se succèdent, les cadavres atrocement mutilés aussi. De quoi attirer la curiosité d’un détective privé (magnifique hommage au personnage de Torpedo des auteurs espagnols Bernet et Abuli, une bande dessinée de la fin du millénaire qui met en scène un tueur à gages très particulier dans les États-Unis du milieu des années 30), mais aussi d’une journaliste venue de la grande ville avec sa grosse moto, son culot et un sens de l’abnégation qui n’a d’égal que son ambition. Tout ce petit monde est rapidement et bien mis en place par Corbeyran au scénario et Pacheco au dessin.
Une base trop secrète
L’enquête peut commencer. La police – plutôt planquée – cherche à minimiser les faits malgré les évidences. Les “natives” grognent, la tension monte, l’enquête du duo détective-journaliste commence à lever des lièvres, la jolie serveuse se découvre, tandis qu’un braquage met en branle toute la hiérarchie de la base militaire et au-delà. Pas de quoi freiner, visiblement, l’appétit des assassins qui continuent à parsemer le désert de cadavres mutilés.
Existe-t-il un lien entre les activités secrètes de ce lieu et les découvertes macabres ? Quel peut être le rôle des quatre frangins décérébrés qui gèrent la casse sous la houlette d’une mère acariâtre ? Que sont devenues toutes les personnes disparues ? Des questions qui trouveront réponse dans un final aussi fantasque qu’irrésistible. Une bande dessinée drôlement bien enlevée, bourrée de références au 9e art et aux polars bien noirs, le tout sur fond de sciences-fictions et des grands fantasmes liés à certaines zones désertiques américaines marqués par des événements jamais vraiment expliqués.
C’est plus que plaisant à lire, la patte de Pacheco, son sens du mouvement, ses cadrages parviennent à nous emmener dans une autre dimension. Excellent album.
Corbeyran – Pacheco – Saint Blancat : Red Creek Shuffle, Ed. L’aqueduc bleu.