Dans l’intimité de l’histoire de la Hongrie avec "Mémoires du Danube"
Découvrez ce roman policier !
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- Publié le 04-06-2023 à 21h05
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Un détective privé d’origine hongroise, qui peine à joindre les deux bouts, se voit confier par Madame Irène, une dame âgée, la mission de retrouver son amour de jeunesse. Seuls indices : une photo prise à Budapest et le nom de cet homme, Andras Ferenczy, avec qui elle a eu une fille, dont il ne connaît pas l’existence. Voilà pour l’intrigue. Mais "Mémoires du Danube" est bien plus qu’un roman policier.
Il y a d’abord l’histoire derrière l’histoire, celle de l’auteur qui renoue à travers ce livre avec ses origines et son père biologique, assassiné par les Croix fléchées (nazis hongrois) sur les rives du Danube, trois mois après sa naissance. Thomas Degré signe donc son ouvrage Thomas Gabriel Leichtner, troquant le nom de famille de son père adoptif contre celui d’un père qu’il a longtemps nié. Une manière de répondre à ce "sentiment trouble de l’avoir trahi", même si le coupable n’est que la barbarie.
Et puis, il y a le récit, un voyage entre fiction et autobiographie. Mystère et histoire. Drame et espoir. À travers Budapest, Paris et Vienne. Des générations et des époques. Des temps de guerre et des temps de paix. L’enquête entraîne d’abord Simon Grünfeld, le personnage principal, dans la tourmente d’Andras, qu’il finit par trouver dans un appartement près de l’iconique Opéra de la capitale hongroise.
Après cette rencontre avec un chasseur de nazis aux prises avec les démons de son passé, le hasard, ou plutôt le destin, précipite le détective sur les traces de ses racines, empreintes du vécu de ses grands-parents juifs pendant la Shoah en Hongrie. Avec Anna, sa grand-mère, on vit l’insouciance de la jeunesse hongroise des années d’avant-guerre, avec en toile de fond le régime de l’amiral Horty - allié de Adolf Hitler et "héros" de l’actuel Premier ministre hongrois Viktor Orban.
On plonge ensuite dans le Budapest de 1944, envahi par les nazis, devenu synonyme de déportations et de massacres d’hommes, femmes et enfants, puis éventré par les bombes et les combats entre forces soviétiques et allemandes. Le roman ne manque pas les détours par des réflexions sur l’identité, la mémoire, le pardon, la rédemption ou la capacité à juger le passé - dans le "chaos de ces années-là", "aurais-je été résistant, milicien ou indifférent ?" Avec le poids de ces questionnements et du cadre, celui des heures les plus sombres du XXe siècle, tranchent cependant une écriture des plus fluides, des pointes d’humour, des personnages attachants et, surtout, des intenses histoires d’amour.
Thomas Gabriel Leichtner, "Mémoires du Danube", Éditions Murmure des soirs, 2023, 182 pp., 20 €.