"Inquisitio", le Moyen Age de Nicolas Cuche
Après avoir apposé sa patte sur "Flics" (TF1), "David Nolande" ou "Le Chasseur" (France 2), le réalisateur et scénariste Nicolas Cuche s’offre un nouveau terrain de jeu : le thriller moyenâgeux.
- Publié le 04-07-2012 à 04h15
- Mis à jour le 05-07-2012 à 14h38
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Correspondante à Paris Après avoir apposé sa patte sur "Flics" (TF1), "David Nolande" ou "Le Chasseur" (France 2), le réalisateur et scénariste Nicolas Cuche s’offre un nouveau terrain de jeu : le thriller moyenâgeux. Pour se laisser embarquer par les ambiances rock’n’roll et les personnages fantasmés d’ InquisitioH H H , il ne faut pas attendre une fiction historique hyperréaliste. Nicolas Cuche aime jouer avec l’inconscient collectif et recréer, par endroits, un Moyen Age de science-fiction ou de jeu vidéo.
"Sur le Moyen Age, les historiens ne sont pas d’accord entre eux. Du coup, il y avait une vraie part de création, une capacité de créer un univers, un monde, d’imposer une direction artistique", souligne l’auteur-réalisateur de cette série en 8 épisodes de 52 minutes. Pour autant, il s’est basé avec ses co-auteurs Véronique Lecharpy, Lionel Pasquier et Sandro Agenor, sur un gros travail de documentation, traquant les détails dans les costumes et les décors.
Pour rendre son récit crédible, Nicolas Cuche est parti de la France de 1370, au moment du Grand Schisme d’Occident. A l’époque, deux papes se disputent la légitimité du pouvoir à la tête de l’Eglise catholique : Clément VII à Avignon et Urbain VI à Rome. C’est dans ce contexte de guerre papale et de complot fomenté par Rome, par le truchement de Catherine de Sienne (Anne Brochet), que deux personnages vont s’affronter : le Grand Inquisiteur Barnal (Vadislav Galard), appelé par Clément VII alors que la peste fait des ravages à Carpentras, et un médecin juif, Samuel de Naples (Aurélien Wiik), qui cherche avec son père David (Hubert Saint-Macary) des remèdes contre la peste. Le premier interprète le mal noir comme un châtiment de Dieu (tenter de l’éradiquer revient donc à s’opposer à Lui), les seconds optent pour une analyse rationnelle.
"Mon Inquisiteur a une blessure extrêmement forte. Il est tiraillé et intelligent. Les Inquisiteurs étaient aussi des érudits qui ont repoussé petit à petit la barbarie, incarnée ici par le recteur de Turennes (Olivier Rabourdin), pour qui la vie humaine n’a aucune valeur", précise Nicolas Cuche, qui refuse de faire d’"Inquisitio" une "série anticléricale". Il s’agit plutôt de "tendre un miroir déformant à notre époque et de faire un film dans le passé qui renvoie à des problématiques qui peuvent être d’actualité, comme le repli communautaire, l’intolérance, le fanatisme religieux ou le terrorisme".
Issu d’un long casting, Vadislav Galard/Barnal en impose par sa taille, son regard intense et la force de son interprétation. La seule déambulation de cet homme barbu, borgne, habillé d’une cape blanche et noire, sur fond de guitare électrique, suffit à installer un climat de crainte. D’autres figures archétypales, comme l’herboriste rousse, Madeleine (Annelise Hesme), le rigoriste rabbin de Milhaud (Philippe Duclos), ou le tortueux cardinal de Mirail (Yves Jacques), au service d’un pape Clément VII particulièrement libidineux (Michaël Vander-Meiren), complètent le tableau, sombre et fantasmagorique.
Davantage conçue pour les soirées d’hiver que pour les courtes nuits d’été, cette série captivante est l’aboutissement de plus de deux ans et demi d’écriture. Bénéficiant de 10 millions d’euros, un budget serré pour 8 épisodes, Nicolas Cuche a dû faire preuve d’inventivité dans la mise en scène. "Mon angoisse est que cela fasse un peu toc, j’aurais voulu plus de cavaliers par exemple. Mais c’est intéressant de se mettre en danger et d’explorer des univers que je ne pourrais pas explorer au cinéma", affirme le réalisateur de "La chance de ma vie" (avec Virginie Efira). "J’avais refusé de faire un long métrage pour réaliser "David Nolande", sur laquelle j’ai travaillé avec une équipe plus jeune que moi, qui avait grandi avec les séries télé." Seule contrainte par rapport au cinéma : la nécessité de rester grand public sur les chaînes généralistes. "France 2 m’a demandé d’atténuer la scène de noyade, et celle où Barnal se crève un œil. J’ai enlevé le son", reconnaît Nicolas Cuche.