De Batman à Leonardo
Lundi soir, le Mip TV proposait en avant-première le premier épisode de "Da Vinci’s Demons", première série télé de David S. Goyer. Laquelle sera diffusée dès ce vendredi par Starz, chaîne du câble américain qui s’est fait un nom à l’international avec "Spartacus" en 2011 et qui présentait également à Cannes une autre série historique, "The White Queen".
Publié le 10-04-2013 à 04h30
avant-premiÈre à Cannes Lundi soir, le Mip TV proposait en avant-première le premier épisode de "Da Vinci’s Demons", première série télé de David S. Goyer. Laquelle sera diffusée dès ce vendredi par Starz, chaîne du câble américain qui s’est fait un nom à l’international avec "Spartacus" en 2011 et qui présentait également à Cannes une autre série historique, "The White Queen".
Peu connu du grand public, le nom de Goyer sonne comme un sésame dans la profession. Il a en effet signé, aux côtés de Christopher Nolan, le scénario de trois des plus gros succès du cinéma hollywoodien de la décennie : la série des "Batman". Mais aussi le script de "Man of Steel", le Superman de Zack Snyder qui envahira les écrans le 13 juin. Tandis qu’on doit également à Goyer un épisode de "Call of Duty", jeu vidéo qui a rapporté plus d’argent que "Avatar" !
Bref, le bonhomme est "bankable". Ce qui explique que deux anciens producteurs de la BBC lui aient laissé carte blanche pour imaginer une série d’envergure internationale. "Je n’avais jamais rien fait d’historique avant cela, expliquait Goyer lundi. J’ai toujours été intéressé par de Vinci. Je leur ai soumis l’idée et ils ont été partants On l’a ensuite proposée à Starz aux Etats-Unis "
Fantaisie historique
Goyer ne cache pas qu’il y a une continuité entre son travail sur Batman et cette relecture de la jeunesse de Léonard de Vinci. Ce dernier ne fut-il pas l’une ses sources de Bob Kane quand il créa Bruce Wayne ? Un inventeur lui aussi dont la cape, lui permettant de voler, est directement inspirée d’une invention de l’artiste italien. C’est d’ailleurs comme cela que Goyer, enfant, a d’abord entendu parler de de Vinci, avant même de savoir qu’il avait peint "La Joconde"
Si, sur le papier, l’analogie est audacieuse, tient-elle la route à l’écran ? Pas sûr On reste dubitatif devant cette transformation de Léonard (interprété par le jeune Anglais Tom Riley, vu dans la série "Monroe") en une sorte de super-héros aux traits agréables (une rumeur prétend que de Vinci avait servi de modèle au David de Michel-Ange), capable de défier trois gardes, une épée dans chaque main (il était ambidextre ).
"J’aime m’intéresser aux personnages mythiques avant qu’ils ne le deviennent", explique David Goyer. C’est ce qu’il avait parfaitement réussi dans "The Dark Knight". Sauf qu’ici, son héros ne sort pas d’une bande dessinée mais bien de la Renaissance.
A force de vouloir en faire à tout prix un héros moderne, en lui donnant un poids qu’il n’a pas eu dans la politique de son époque, en le plaçant au centre d’inextricables intrigues de palais ésotériques, "Da Vinci’s Demons" perd tout lien avec le réel, se réduisant à une simple "fantaisie historique".
C’est là que David Goyer montre le plus plus cruellement ses limites, dans son incapacité à s’affranchir de ses propres références. Il a beau affirmer avoir fait de nombreuses recherches historiques, il retombe dans les cases bien définies du comics. Sa série n’intéressera sans doute qu’un public plutôt masculin, jeune et guère exigeant. Comme c’était déjà le cas pour "Spartacus", autre série Starz.
Difficile en effet pour les autres de tenir bien longtemps face à cette improbable reconstitution historique, à cette mise en scène trop démonstrative, trop léchée, trop fausse. Tournée au Pays de Galle en anglais, "Da Vinci’s Demons" ne parvient jamais à rendre l’atmosphère lumineuse de la Toscane, tandis que l’on pourrait sans problème troquer la cour des Médicis par celle des Tudor qu’on n’y verrait que du feu. Un talon d’Achille fréquent dans ces productions internationales qui, à trop chercher l’universalité, finissent par perdre leur âme.
Reste à voir si le public suivra. Une première saison de 8 épisodes est déjà en boîte. Et David Goyer dit avoir déjà en tête 5 ou 6 saisons, chacune se concentrant sur un épisode célèbre de la vie de l’humaniste toscan
Bande annonce à voir sur le blog : http://laloidesseries.blogs.lalibre.be/