"Speakerine", la nouvelle série événement de France 2, bien plus qu'un Mad Men bis (ENTRETIEN)
Publié le 16-04-2018 à 11h38 - Mis à jour le 16-04-2018 à 18h30
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L’émancipation d’une speakerine dans les années 60 : les 1ers épisodes, à 20 h 55 sur France 2.La productrice Charline Delépine (Macondo) a porté Speakerine : 6 x 52 min dans l’univers de la RTF des années 60.
Comment est née cette série ?
Deux jeunes scénaristes sortis du Conservatoire européen d’écriture (CEA), Valentine Milville et José Caltagirone, m’ont apporté ce sujet qui, à l’origine, interrogeait le statut de la femme dans les années 60, dans les coulisses de la télévision, et mettait en scène des speakerines, et non une seule [incarnée par Marie Gillain, NdlR].
Qu’est-ce qui vous a séduite ?
J’ai été séduite par le propos féministe de la série. Un des premiers éléments mis en avant dans le synopsis est cette réponse du général de Gaulle suite à une question : "Un ministère de la Femme ? Et pourquoi pas un sous-secrétariat au tricot !" Nous avons oublié combien les lois ont été longues à se mettre en place, particulièrement en France. Et il me semblait important de rappeler cette longue évolution, dans cette période où l’on met en avant le statut de la femme. La fiction est un lieu parfait pour pouvoir mélanger du romanesque divertissant et la mise en perspective, dans cette époque-là, de choses qui nous paraissent aujourd’hui évidentes.
Vous mêlez thriller et background socio-politique ?
Nous avons eu un long processus d’écriture. Les auteurs ont pu s’appuyer sur deux lignes narratives complémentaires : l’émancipation de Christine, l’héroïne, et le climat socio-politique extrêmement tendu de 1962, avec les millions de rapatriés d’Algérie qui arrivent en France, les tensions autour de la guerre d’Algérie, les attentats de l’OAS…
Vous montrez aussi une télé publique aux ordres…
Le fait que tous les bobinos du journal passaient par le ministère de l’Information voire par l’Elysée, avant d’être à l’antenne, c’est vrai. Et cela va encore se durcir avant d’éclater en 68. Nous avions beaucoup de documentation et les auteurs s’y sont perdus. J’ai fait appel à Nicole Jamet ("Dolmen"), qui a un grand sens du romanesque et a réussi à se détacher du côté documentaire.
Quel est le coût de la série ?
Plus d’un million d’euros par épisode. Et encore, il y a peu d’extérieurs. Les auteurs ont travaillé pour éviter les figurants habillés, les voitures d’époque et tout ce qui nécessite de la retouche en effets spéciaux pour enlever la pollution contemporaine. Nous avons eu 3 à 4 mois de préparation, contre 8 à 10 semaines habituellement.
Y avait-il une charte au niveau de l’image ?
Je ne voulais qu’à aucun moment costumes et décors ne soient plus puissants que nos personnages. Je voulais éviter l’effet "Mad Men" et le côté obsessionnel de l’époque. Je préférais une évocation, sans être ultra-réaliste.
Les comédiens sont-ils entrés facilement dans ce cadre ?
Pour eux, une fiction d’époque, c’est assez jouissif. Marie Gillain, qui avait deux heures de maquillage et coiffure chaque jour, a travaillé la diction très articulée de l’époque, pour se mettre dans une rythmique plus lente, en veillant à prononcer les négations. Tout en évitant la caricature.