Jonas et les fantômes de la nuit
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Publié le 23-11-2018 à 13h14
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Doté de trois prix à La Rochelle, ce premier film impose son style. Arte, 20 h 55Après une énième bagarre et nuit d’ivresse en boîte, le compagnon de Jonas décide le mettre à la porte. Impossible de se réfugier chez ses parents, partis en vacances. Alors qu’il s’installe dans une chambre d’hôtel, soudain, ses pensées l’assaillent.
Jonas relate l’histoire d’une déchirure, du remords qui, tel un spectre inquiétant, poursuit un adolescent et marque à jamais son passage à l’âge adulte. À 15 ans, Jonas est un élève insouciant, il a ce côté solaire et léger de ceux qui viennent de quitter l’enfance.
Les réminiscences de l’adolescence
Lorsque Nathan (Tommy-Lee Baïk) arrive dans son lycée, en quelques jours, sa vie va changer : complicité, confidences, premières cigarettes et attirance. Jonas se sent pousser des ailes et, en même temps, les premières remarques et brimades homophobes surgissent. Mais Nathan est là, qui l’apaise et le réconforte. Jusqu’à "l’accident", la disparition… Ce soir où Nathan et Jonas tentaient, pour la première fois, de sortir ensemble en boîte de nuit. Depuis ce soir fatidique, la vie de Jonas a basculé dans le non-dit et l’instabilité.
Avec Jonas, Christophe Charrier signe une première réalisation stylisée et très maîtrisée, portée par des émotions puisées, en partie, dans sa propre adolescence à Toulon. Cette proposition, à la fois intime et universelle, a séduit le jury du Festival de la fiction TV de la Rochelle, à la rentrée. Les jurés, emmenés par la Belge Marie Gillain, lui ont accordé trois prix : meilleur téléfilm, meilleure réalisation et meilleure musique originale créée par Alex Beaupain. Au fil de ces 82 minutes en apesanteur, on ne peut que saluer l’heureux mariage né de la rencontre entre les sons et les images.
Un premier film, une réussite
Le comédien Félix Maritaud (vu dans le film 120 battements par minute) prête sa force tourmentée et indocile au Jonas adulte tandis que le jeune Nicolas Bauwens insuffle une fragilité rêveuse au Jonas adolescent.
La fiction passe harmonieusement d’une époque à l’autre par le biais de rêveries et de flash-backs aux couleurs fauves qui contrastent avec le quotidien chaotique d’un Jonas à jamais insaisissable, mystérieux. Un adulte hanté par les souvenirs de son innocence envolée.
Entre ado discret et fragile et adulte abîmé et en lutte, Christophe Charrier tisse des liens au fil d’une chronique sincère aux accents sans doute en partie personnels. Visiblement peu impressionné par l’ampleur de la tâche, le réalisateur impose sa patte délicatement cinématographique sur cette première fiction long format, faisant rimer ses atmosphères soignées, déployées au cœur de la nuit toulonnaise, avec une bande-son délicate et inspirée.
À l’arrivée, on ne peut que saluer un beau travail d’équipe (techniciens et comédiens) et la naissance d’un artiste, sans aucun doute.Karin Tshidimba