Dominique Besnehard, créateur de Dix pour cent : "Toutes les relations que les agents ont avec les acteurs sont des copier-coller de mon expérience personnelle"
Avec Dix pour cent, ce dernier revit, avec tendresse, les situations rencontrées lors de sa carrière. Même si elles ne sont pas toutes glorieuses… Dix pour cent Mercredi à 21.00 sur France
Publié le 25-11-2018 à 09h01 - Mis à jour le 25-11-2018 à 09h06
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Avec Dix pour cent, ce dernier revit, avec tendresse, les situations rencontrées lors de sa carrière. Même si elles ne sont pas toutes glorieuses…Dix pour cent Mercredi à 21.00 sur France "Aujourd’hui, on en parle plus pour parler de sa famille que pour parler d’elle et je trouve ça bien dommage. " Par " elle ", Dominique Besnehard fait allusion à l’actrice Laura Smet, fille de Nathalie Baye et Johnny Hallyday. Le célèbre agent artistique se souvient du jour où il a fait de sa filleule l’un de ses poulains. " Je la revois passer une audition pour Les Corps impatients. Ça m’a tellement touché… À ce moment-là, je me suis dit que Laura ne devait rien à sa mère, ni à son père. Elle était jeune, talentueuse et avait un bel avenir devant elle . Même chose avec Eva Green, fille de Marlène Jobert. Les gens n’imaginent pas la difficulté d’être fils ou fille d’un acteur connu aujourd’hui. Ils sont sans cesse ramenés à leurs parents. "
Féru de septième art et de théâtre depuis l’enfance, le Normand tombe dans la marmite assez rapidement. Et, pour cause, il sait exactement ce qu’il veut faire de sa vie : s’occuper des comédiens. On est en 1974, Besnehard a 20 ans et une rencontre va bouleverser sa vie. Le réalisateur français Jacques Doillon accomplit son rêve en faisant de lui son assistant, un poste qu’il tient pendant pas moins de dix ans. Sa carrière monumentale prend un tournant en 1986 quand il décide de devenir agent chez Artmédia. D’Isabelle Adjani à Sophie Marceau en passant par Béatrice Dalle, Sylvie Vartan ou encore Line Renaud, il aura été le bras droit, le conseiller artistique, l’oreille attentive de nombreuses stars du grand écran.
Des anecdotes, Dominique Besnehard en a donc à revendre. La meilleure manière qu’il a trouvé pour les partager avec le grand public? En créer une série unique en demandant à des acteurs de jouer leur propre rôle. Dix pour cent ( en référence à la rémunération que perçoit l'agent sur le cachet de l’acteur) est né et c’est un carton.
Vous avez créé Dix pour cent, une série diffusée sur France 2 racontant le quotidien des agents artistiques. Était-ce pour mettre en valeur un métier finalement peu connu du grand public ?
"Je ne voulais pas forcément mieux faire connaître notre métier. Je voulais, avant tout, parler de notre quotidien, celui des petites mains. La confrontation entre l’univers des acteurs et celui des agents m’intéressait. Comment ces derniers vivaient ensemble ? Au final, on se rend compte que c’est une histoire d’entreprise avec les conflits qu’elle rencontre."
La série a tout de même un côté romancé. Quand sommes-nous dans la pure fiction ?
"C’est romancé sans trop l’être. Toutes les relations que les agents ont avec les acteurs sont des copier-coller de mon expérience personnelle. Au niveau des vies des agents, on est parfois dans la fiction mais de la fiction sincère. Je pense, par exemple à Andréa (interprétée par Camille Cottin, NdlR) qui fréquente les réseaux de rencontres. Dans le sixième épisode de cette troisième saison, on sera davantage dans le délire parce que de la comédie, il en faut aussi dans cette série."
De quel personnage vous rapprochez-vous le plus dans la série ?
"De Gabriel (interprété par Grégory Montel, NdlR) sans hésiter. Il est toujours un peu au bord des limites. Tous les personnages étaient un peu plus proches de moi au début. Mais, avec le temps, ils ont pris leur envol."
Certains de vos clients se reconnaissent dans le jeu d’autres acteurs ?
"Oui, tout le temps. Pour Béatrice Dalle, par exemple, j’ai repris une histoire qu’elle a vécue des années auparavant. La chirurgie esthétique, la question de l’âge ou encore la perte de mémoire, ce sont des thèmes que l’on aborde souvent dans ce métier. Dans la deuxième saison, Guy Marchand souffre de perte de mémoire. Il m’a été inspiré par François Périer, par exemple."
Il faut quand même beaucoup d’autodérision pour pouvoir jouer son propre rôle à l’écran…
"C’est la base. Certains veulent parfois changer quelques petits choses, ce n’est pas trop grave si on garde l’idée de départ. S’ils ne veulent pas se prêter au jeu, alors il ne faut pas le faire. Pour cela, je salue l’autodérision et le côté décalé des acteurs belges. Je pense à Cécile de France qui a ouvert la première saison. Elle parlait du vieillissement. Il faut avoir beaucoup d’autodérision pour pouvoir faire ça a l’écran. Certains acteurs en sont incapables."
Vous avez récemment lancé un appel à Gérard Depardieu que vous rêvez de voir dans la série. Vous a-t-il contacté à ce sujet ?
"Non, pas encore. Je connais Gérard depuis 40 ans et je l’aime beaucoup. Il n’avait pas envie d’être dans la première saison. Ne pas l’avoir, ce serait vraiment dommage parce que c’est un monument. On réfléchit à une histoire pour lui, quelque chose d’assez costaud. Mais, on ne va pas commencer à en créer une pour quelqu’un qui n’a pas envie de venir."
Y a-t-il des situations que vous voudriez voir à l’écran mais pour lesquelles vous n’avez pas encore trouvé l’acteur idéal ?
"Oui, il y a une anecdote que j’ai vraiment envie de raconter : celle de Jeanne Moreau. C’est une actrice aux côtés pas toujours sympathiques mais au talent immense."
Avez-vous vous encore beaucoup d’anecdotes en stock ?
"J’en ai encore mais ça s’épuise. Bien que je laisse la porte ouverte à une cinquième saison, je ne sais pas si on pourra dépasser la quatrième. Ce qui est certain, c’est qu’on n’aura pas une longévité comme Une famille formidable ! Pour les agents, on pourra toujours trouver des histoires à raconter mais pour les acteurs, ça devient plus difficile…"
Un mot sur le départ de Fanny Herrero, l’une de vos scénaristes ?
"On savait qu’elle allait partir mais j’ai trouvé ça un peu déplacé qu’elle l’annonce juste avant la diffusion de cette troisième saison. Tout de suite, les gens ont eu l’impression qu’il y avait une mauvaise entente alors que ce n’est pas du tout le cas. On a trouvé deux remplaçants brillants que j’avais repérés depuis longtemps."
Aujourd’hui, le métier d’agent est le même que celui que vous avez connu à vos débuts ?
"Non, pas du tout ! Aujourd’hui, les contrats sont beaucoup plus stricts. Avant, on avait dix conditions dans un contrat, maintenant il y en a vingt. Les rapports avec les acteurs ont changé aussi. À mes débuts, on les connaissait et on les voyait évoluer. Maintenant, on a l’impression que tout se fait par Internet. Il y a moins d’humain dans les relations agent-acteur. Quand on avait un problème au bureau, on se retrouvait dans le couloir et on en parlait. Maintenant, tout se fait par mail. L’écrit est plus violent que la parole. Donc, parfois ça passe mal… On est davantage dans l’efficacité et la rapidité. Je me souviens qu’après une journée de travail, je revenais à mon bureau le soir et je rappelais au moins 15 personnes parce que le portable n’existait pas à l’époque. Les nouvelles technologies ont amené du bon et du mauvais."
Il y a eu de bons moments mais également des moins bons…
"Ah oui, on ne peut pas y échapper ! Quand le film ne fonctionne pas ou quand l’acteur se fait bouder par le public, certains nous reposent parfois tout sur le dos. Je perdais des acteurs presque tous les mercredis, jour de sortie des films en salle. Il y a eu des rapports conflictuels mais peu de trahison."