La Tunisie renforce la régulation de son audiovisuel grâce à la Belgique
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Publié le 13-12-2018 à 13h16 - Mis à jour le 16-12-2018 à 19h34
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Le CSA belge coordonne un jumelage avec son homologue tunisienne de régulation du secteur. Une opération de consolidation de cet outil issu de la révolution et consacrant la transition démocratique.
La libération de la parole publique a été l’un des effets les plus spectaculaires de la révolution tunisienne. D’un coup, il y a presque huit ans, les Tunisiens se sont remis à parler sans plus craindre d’être menacés, réprimés, arrêtés. Après des décennies de dictature, cette parole libérée s’est propagée, non sans excès, dans une sphère médiatique foisonnante, voire anarchique. Mais qui dit liberté d’expression dit aussi responsabilité, à plus forte raisonn dans une Tunisie qui s’est engagée dans une transition démocratique. L’État a donc créé, en mai 2013, une Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica), afin de garantir la liberté d’expression et d’information, l’indépendance et le pluralisme des médias audiovisuels. La mission de cette instance, gravée dans le marbre constitutionnel en 2014, consiste aussi à organiser et à encadrer le champ de ces médias afin, notamment, de contrôler et prévenir les dérapages.
L’autorité de régulation tunisienne travaille aujourd’hui avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) belge. Leur jumelage a été lancé officiellement ce jeudi à Tunis. L’objectif de cette opération, prévue sur 21 mois et qui a débuté le 1er octobre, est de consolider le rôle et la légitimité de l’instance tunisienne. Le projet, coordonné par le CSA au sein d’un consortium avec l’Institut national de l’audiovisuel (INA) français, s’inscrit dans le cadre de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Tunisie, qui prévoit des jumelages dans divers domaines d’activités. Ce projet en particulier, doté de 800 000 euros de fonds européens, entend donc renforcer une instance, qui est l’un des principaux acquis de la révolution et dont le rôle est fondamental pour la consécration du processus démocratique, précise l’autorité tunisienne.
"Nous venons, à la demande de l’Haica, afin renforcer son rôle dans la sauvegarde et la promotion de la liberté d’expression, dans le pluralisme des idées. Le but est aussi d’asseoir la pertinence et la légitimité de cette instance au sein du paysage médiatique tunisien", résume Paul-Eric Mosseray, directeur de la transition numérique au CSA et chef du projet de jumelage. "C’est un projet commun dans lequel nous apportons notre expertise et notre expérience, donc nos outils et nos méthodes, afin que les Tunisiens s’en inspirent dans la mise en place de leurs procédures."
Pour son président, Nouri Lajmi, l’amélioration de ses modes d’action est une priorité pour l’Haica afin de réguler au mieux le paysage audiovisuel tunisien qui a changé du tout au tout depuis la révolution. Celui-ci est en effet passé d’un système où les organes médiatiques, publics comme privés, étaient utilisés comme caisses de résonance de la propagande d’État, à un nouvel environnement pluriel et diversifié. Ce pluralisme est d’ailleurs l’un des nombreux chantiers que le régulateur tunisien a investis en cinq ans et demi d’existence, malgré des moyens réduits et alors que beaucoup reste à faire. L’Haica s’est ainsi assurée que les règles d’équité et de diversité des opinions soient respectées durant les processus électoraux. "Grâce au jumelage, nous allons renforcer ce pluralisme dans d’autres domaines qui n’ont pas encore été vraiment exploités comme la protection des droits de l’enfant ou des droits des consommateurs", explique Paul-Eric Mosseray.
L’instance produit aussi des recommandations, entre autres sur le traitement médiatique des attentats. Elle lutte contre la propagation des discours de haine et diverses formes de discriminations. Les prochains chantiers concernent la création d'un centre de documentation et d'un outil technique d'archivage audiovisuelle, grâce en particulier à la collaboration de l'INA.