Matt Leblanc : "Friends fut ma bouée de sauvetage"
Matt Leblanc, inoubliable co-héros de Friends, nous confie comment cette cultissime sitcom a bouleversé sa vie.
Publié le 04-08-2019 à 12h51
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Matt Leblanc, inoubliable co-héros de Friends, nous confie comment cette cultissime sitcom a bouleversé sa vie.Pour des milliards de gens à travers le monde, vous resterez l’une des co-stars des séries les plus emblématiques de la télé américaine. Est-il vrai que le planning de Friends vous vampirisait au point de ne plus avoir une minute à vous ?
"Il ne faut pas exagérer. Nous connaissions parfaitement la mécanique de Friends, ce qui nous permettait de ne pas trop nous éterniser sur les plateaux. Mais bon, ce fut un vrai challenge. D’autant que je n’ai jamais été un raide dingue du travail. C’est pour cela d’ailleurs que j’ai longtemps admiré des gens comme George Clooney. Il a été capable de tourner Urgences et Batman en même temps. Pour moi, ce mec est un vrai super-héros doublé d’un mystère. Je me demande en effet comment il a fait pour concilier les deux ! Il avait un clone là-dessous, c’est sûr !"
À quel moment précis avez-vous compris que votre vie ne serait plus jamais comme avant ?
"Dans un sauna ! Un type est venu à ma rencontre et m’a lancé : ‘Hey ! Vous, vous ne seriez pas le gars de Friends ?’. Je ne me suis pas démonté et je lui ai répondu : ‘Ouais, chaque centimètre carré de cul que vous reluquez en ce moment appartient bien à Matt LeBlanc’. Vous parlez d’un endroit saugrenu pour interpeller les gens ! Et puis, il y a cette droguerie dans laquelle je venais d’acheter des cotons-tiges et des rouleaux de papier toilette. J’étais en train d’attendre à la caisse lorsque je vis derrière moi une file d’une dizaine de personnes. L’une d’entre elles m’a dit : ‘Nous vous avons suivi, mais pas de panique, réglez ce que vous avez à régler et nous vous demanderons un autographe après !’. Très embarrassant !"
Quelle est votre définition de la célébrité ?
"C’est avoir la sensation d’être nu, accroché à une branche d’arbre un jour de grand vent ! C’est aussi un peu comme les glaces, ça peut fondre rapidement. Et puis, il y a les parfums du jour. Quand on les a trop goûtés, qu’on les a trop vus, on préfère changer. Bref, ce que je veux dire par là, c’est qu’on ne peut pas éternellement rester au goût du jour. Et que ceux qui durent dans ce métier sont ceux qui ne se surexposent pas."
Il paraît qu’avant de signer pour Friends, vous ramiez et envisagiez même une reconversion ?
"Friends fut ma bouée de sauvetage. J’avais tourné des pubs pour le Ketchup Heinz et pour Coca et participé à plusieurs shows auparavant qui s’étaient toutes soldés par des échecs."
Après Friends, qu’avez-vous fait ensuite de votre vie ? Vous êtes-vous senti déboussolé ?
"Je vous le répète ce fut dur. Très dur. Vous ne pouvez pas savoir à quel point Friends a été une étape cruciale de mon existence ! Vous en connaissez-vous des acteurs et des actrices qui peuvent se vanter d’avoir pu bosser pendant dix ans dans un show qui cartonnait ? Et pourtant, rien n’était acquis ! Je revois encore Jimmy Burrows, le directeur de la série, nous amener tous les six à Las Vegas et nous dire de prendre soin l’un de l’autre puisque personne n’avait aucune idée du projet dans lequel nous nous embarquions. Monsieur Burrows nous a alors donné à chacun 500$ en nous déclarant : ‘Profitez-en mes enfants, c’est peut-être la dernière fois que vous pourrez vous promener dans un casino sans que l’on vous dérange !
Au fil des épisodes de Friends, Courtney, Lisa, Matthew, David, Jennifer et moi sommes devenus très proches. Il n’y a jamais eu de mensonges entre nous, de jalousie, de traîtrise, de coups de poignard dans le dos. À l’époque où nous renégocions nos contrats et nos salaires, aucun d’entre nous n’a voulu tirer la couverture à lui. Et c’est tant mieux parce que je crois que le show n’aurait pas survécu à des égos surdimensionnés !"
Mais globalement, Friends vous a offert d’incroyables opportunités…
"Oui cela m’a ouvert des portes et permis d’accéder au monde du cinéma. Cette série m’a permis aussi d’avoir confiance en moi. De ne plus me poser de questions concernant d’éventuelles fins de mois difficiles. Après plus de dix ans de travail et de surexposition ininterrompue, je me suis dit que ça serait bien de lever le pied. Je suis donc retourné chez ma mère, puis je me suis focalisé sur l’éducation de ma fille. Je préparais le petit-déjeuner, l’amenais à l’école, lui apprenait à lire. Ma femme ayant beaucoup de travail, tout le monde y trouvait son compte. De toute façon, mon agenda pro était presque vide ! Il y a eu une grosse période de flottement !"
Cela vous a-t-il affecté ?
"Vous savez, je viens d’une famille d’ouvriers. Une famille par essence très terre à terre. Je me dis que j’ai été chanceux d’avoir été au générique d’une des séries les plus marquantes de la télévision. OK, la suite de ma carrière n’a pas pris immédiatement la tournure que j’espérais. Mais je n’avais pas un cancer à soigner. J’étais en pleine forme et mon frigo était rempli. Je crois surtout qu’il en faut plus pour m’abattre. Je suis un type ultrapositif et qui aime prendre la vie du bon côté. Lorsqu’il y a un enterrement je suis, par exemple, le premier à raconter des blagues. L’important, c’est que ma mère soit fière de moi. Et elle l’est ! (rires)"
On a pourtant évoqué une dépression après Friends ?
"C’est faux ! Il faut plutôt parler d’une période de réadaptation ! On ne sort pas d’un show ayant connu un tel succès planétaire avec une sorte de détachement. Friends a occupé une grande partie de ma vie. Cela n’a pas été facile de tourner la page. D’autant que j’ai enchaîné avec un échec. Pendant deux ans, je me suis éclaté avec la série Joey. Et en plus, je me suis fait beaucoup de fric ! Après la "mise à mort" de Friends, les studios Warner avaient besoin d’une série pour prendre le relais. Il fallait battre le fer tant qu’il était chaud. Les téléspectateurs ne voulaient pas qu’on les dépossède comme ça de leur série préférée. Joey est né dans le but de désamorcer des frustrations. Du coup, la pression était énorme. Sur moi, les scénaristes, les autres acteurs. Nous bossions comme des fous pour que ce programme tienne la route. Le problème avec Joey, c’est que ce show avait été écrit dans la précipitation. La gamelle était prévisible."
Vous en avez tiré quoi comme leçon ?
"Cela m’a fait comprendre à quel point une série devait être bien écrite si elle voulait rester à l’antenne. La chute fut douloureuse mais la leçon que j’en ai tirée fut riche d’enseignements. Pendant toutes les années avec mes potes de Friends, nous avions peut-être perdu de vue qu’un jour ou l’autre, tout s’arrêterait. On dit souvent les meilleures choses ont une fin et cette fin, je ne l’ai pas vue venir ! Après ça, nous avons eu tous les six le sentiment d’être constamment attendus au tournant. À partir du moment où nous avons entrepris quelque chose de nouveau dans nos vies, on a passé nos faits et gestes au microscope."