"Les grands romans du scandale": un hymne à la littérature et à la liberté
"Les grands romans du scandale" évoque l’œuvre de plusieurs auteurs mythiques.
- Publié le 16-10-2019 à 08h31
- Mis à jour le 16-10-2019 à 08h34
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"Les grands romans du scandale" évoque l’œuvre de plusieurs auteurs mythiques. Je n’ai jamais lu un orgasme, y compris un orgasme féminin, aussi bien décrit que par Lawrence", affirme Catherine Millet, l’auteure de La Vie sexuelle de Catherine M . De fait, l’écrivain britannique D.H. Lawrence avait demandé à Frieda von Richthofen, son épouse, de lui décrire l’expérience d’un orgasme féminin avec le plus de détails possible afin qu’il puisse nourrir son roman, L’Amant de Lady Chatterley. Interdit depuis sa sortie à compte d’auteur, en 1928, il raconte l’histoire d’un aristocrate qui devient impuissant et qui est incapable de satisfaire sexuellement son épouse. Celle-ci se tourne alors vers un garde-chasse. Tuberculeux, D.H. Lawrence est lui-même malade depuis longtemps. Il sait que son épouse satisfait ses désirs auprès d’autres hommes. Et il défend totalement son droit à le faire. Le tout premier modèle de Constance Chatterley, c’est son épouse, sa muse, dont il défend la liberté dans leur mariage.
Un roman féminin
Ce soir, à 23 h 40, Le Procès de Lady Chatterley - Orgasme et lutte des classes dans un jardin anglais ouvre la collection documentaire Les grands romans du scandale qui sera diffusée tous les mercredis vers 22 h 30, du 16 octobre au 13 novembre, sur Arte en évoquant notamment Les Versets sataniques de Salman Rushdie au roman Les Raisins de la colère de John Steinbeck.
Avec finesse, le documentaire de Mathilde Damoisel retrace le contexte de l’œuvre et, surtout, lui redonne toute sa singularité et sa puissance littéraire. En s’appuyant sur les critiques littéraires et les analyses des écrivains, dont Sylvain Tesson, elle défend ce roman qui peut être lu comme une lettre d’amour d’une grande générosité à sa femme. "En cela, on peut dire que c’est un roman féminin, l’histoire d’une femme qui quitte un mariage de façade pour vivre un autre mariage, du cœur, du corps et de l’esprit", analyse Catherine Brown, du New College of The Humanities.
Une résolution des divisions
En 1960, les éditions Penguin Books décident de republier L’Amant de Lady Chatterley en vertu d’une nouvelle loi autorisant la parution d’une œuvre "obscène" si un tribunal lui reconnaît des qualités littéraires. Le documentaire retrace les minutes du procès. Si l’on connaît les accusations, le défilé à la barre des professeurs de littérature, des critiques et même d’un évêque, venus défendre le roman est absolument édifiant.
Cette histoire fait aussi écho aux divisions sociales dont est témoin l’écrivain. "Il essaie à travers la relation amoureuse d’un garde-chasse et de la femme d’un aristocrate propriétaire de mine, de penser une résolution", explique Andrew Harrison du D.H. Lawrence Research Center. Une analyse que ne renierait pas l’écrivain, fils de mineurs. "En tant qu’homme de la classe ouvrière, je sens bien qu’au contact de la classe moyenne je suis coupé de ce qui me rend vivant. Alors pourquoi je ne vis pas au sein de la classe ouvrière ? Mais parce qu’elle-même limite aussi. On ne doit vraiment appartenir à aucune classe" , affirmait déjà D.H. Lawrence.