"On peut reconstituer des univers narratifs avec le son"
Lorenzo Benedetti a mis sur orbite "Paradiso", un nouvel acteurde la production à visée internationale. Entretien Caroline Gourdin Correspondante à Paris Séries documentaires ou formats courts de comédie, le podcast audio attire les investisseurs et les plateformes. Il permet aussi de tester de nouveaux concepts, selon Lorenzo Benedetti (ex-Studio Bagel).
Publié le 21-10-2019 à 09h41 - Mis à jour le 21-10-2019 à 09h42
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Lorenzo Benedetti a mis sur orbite "Paradiso", un nouvel acteurde la production à visée internationale. Séries documentaires ou formats courts de comédie, le podcast audio attire les investisseurs et les plateformes. Il permet aussi de tester de nouveaux concepts, selon Lorenzo Benedetti (ex-Studio Bagel).
Pourquoi avoir créé "Paradiso", votre studio de production de podcasts ?
D’abord, j’ai eu la chance de produire une série audiovisuelle pour Canal +, Calls, qui m’a ouvert les yeux sur le fait qu’uniquement avec de l’audio, on pouvait développer des univers narratifs complexes et réunir des talents prestigieux, dans un budget raisonnable. En outre, depuis un an, il y a eu une accélération du marché de contenus premium audio, avec l’arrivée de Spotify, Audible, Sybel, Majelan, et bientôt Apple, qui ont besoin de productions originales audio. Quelques sociétés de production travaillent déjà avec ces plateformes mais il y en a peu et nous arrivons avec une expertise intéressante. Avec mes associés, Louis Daboussy (ex-DGA de Konbini) et Benoît Dunaigre (cofondateur et chef du son de HRCLS, agence de création audiovisuelle d’Havas), nous nous sommes accordés sur une même vision et nous nous sommes lancés.
Produire des formats pour des plateformes ayant un rayonnement international implique-t-il des contraintes ?
L’avantage aujourd’hui, c’est qu’il n’y a pas de règles ni de cas pratiques d’usages qui définissent le format roi. Nous essayons de travailler à des concepts qui pourraient s’exporter. Allô promo (Spotify) est un format court de comédie qui consiste à permettre aux artistes de faire leur promotion grâce à un serveur vocal. Ce concept simple en production peut s’exporter, dans toutes les langues, avec des invités de tous les pays.
Quels sont vos projets ?
Nous nous concentrons sur trois genres : la fiction, le documentaire et la jeunesse. Nous avons lancé le studio avec notre format documentaire Le Grêlé (une série judiciaire sur Sybel, NdlR), et avec notre format court de comédie, qui cible les 18-25 ans. Nous préparons deux autres fictions pour un public ado pour l’an prochain et développons des séries d’adaptation pour les tout-petits et les 7-14 ans. Dès janvier, nous lancerons les premières productions. Il y a trop peu de contenus pour les enfants dans les podcasts, et c’est dommage parce que le podcast développe l’imaginaire dans cette période où les enfants sont soumis à tous les écrans.
Quelle est la durée moyenne de vos podcasts ?
Nous avons des formats de 8 x 13 minutes ou de 9 x 10 minutes en fiction. En doc, ce sont plutôt des formats de 6 ou 8 x 30 ou 40 minutes. Et on travaille sur des formats courts de 3 à 5 minutes, sur Allô promo et sur des programmes jeunesse. Lors des débuts de YouTube, il fallait des formats très courts, et nous en avons développé beaucoup avec le studio Bagel. Les podcasts ont d’abord démarré avec des formats de 20, 30 minutes, voire une heure, que les gens ont le temps d’écouter, dans les transports notamment. Mais les formats se réduisent. Les gens aiment tester de nouveaux trucs. En fiction, il y a une tendance au 8, 10 minutes.
C’est beaucoup plus léger à produire que l’image ?
Oui, mais les budgets dédiés à l’écriture restent importants parce qu’on veut travailler avec des talents intéressants. Ensuite, la partie technique de production demande moins de moyens, nous n’avons ni décors ni figurants. En fiction, on peut reconstituer des univers narratifs avec le son, qui a un pouvoir d’évocation très fort. On travaille avec des réalisateurs, des compositeurs, des sound designers, venant de l’univers du cinéma, de la télé ou de la pub. Par exemple, on travaille en collaboration avec les scénaristes Cyril Tysz et Guillaume Enard, respectivement directeur de collection et scénariste sur Skam (slash.tv), et avec Géraldine de Margerie, auteure-réalisatrice d’Allô promo.
Y a-t-il d’autres thématiques dont vous pouvez parler ?
C’est un peu tôt. Nous allons égrener notre line up au fil de l’année, pour arriver à une quinzaine de projets à la fin de la saison.
Aviez-vous besoin d’un financement important à la base ?
On ne communique pas sur le chiffre, mais nous avons levé des fonds pour développer des projets, rémunérer des gens, avoir rapidement une taille critique. On a embauché cinq personnes en septembre et on arrivera à une trentaine d’ici 2020. Nous allons avoir notre propre studio, dans le 11e arrondissement.
Vous souhaitez revendre les concepts, à l’instar de "Calls", repris par Apple pour une adaptation audiovisuelle ?
Cela fait quinze ans que je travaille dans l’audiovisuel. Je choisis le podcast parce que c’est un format phare, agile, rapide dans son schéma de fabrication. Au-delà de l’intérêt à l’international, notre critère est de savoir si une histoire pourrait continuer sous une autre forme, devenir une série de fiction audiovisuelle ou un doc télé. Le podcast est une sorte de laboratoire. Des plateformes comme Amazon Prime, Netflix, Canal + et les médias traditionnels voient aussi l’audio comme une source d’inspiration et d’expansion de leur empreinte digitale.