Cindya Izzarelli : "Le but, c’était vraiment de parler de ces femmes qui ont marqué l’histoire de la culture"
Publié le 21-02-2020 à 15h28
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Chaque vendredi dès 9h, Cindya Izzarelli met en avant celles que la société a oubliées.
Cindya Izzarelli multiplie les chroniques du côté de Reyers. Dans Le Mug, l’émission consacrée aux médias et à la pop culture de La Première, elle sévit notamment chaque vendredi matin (de 9 à 10 h) en réalisant "Cherchez la femme", une chronique écrite avec intelligence et un style qui lui est propre.
Il y a un ouvrage qui vous a marquée plus qu’un autre ?
Le premier bouquin que j’ai eu dans ma liste de lecture lors de mes études d’interprétariat, c’était The Handmaid’s Tale bien avant tout le ramdam d’aujourd’hui autour de la série. Margaret Atwood, à ce niveau-là, m’a chamboulée. Avoir une dystopie écrite par une femme et qui parle de la condition des femmes, il n’y a rien à faire, ça sème des graines. Même si à l’époque je n’avais pas les armes, la maturité pour réfléchir à ce que ça voulait vraiment dire, ça marque.
Comment est née "Cherchez la femme" ?
Le but, c’était vraiment de parler de ces femmes qui ont marqué l’histoire de la culture, de la pop culture, des médias. Cela ne veut pas forcément dire en bien. Il y a des gens qui ont marqué l’histoire et qui n’ont pas forcément été validés par la société, le public, etc. J’aime beaucoup aller chercher des personnages comme, récemment, la Cicciolina. Elle a toujours été caractérisée comme une actrice porno qui a essayé un peu d’exister dans les médias. Quand on creuse, c’est un peu plus profond que cela, parce qu’on le veuille, ou non, elle a apporté des changements profonds dans la politique italienne. Elle a libéré les mœurs, amené ce basculement dans la politique du spectacle, ouvert la voie aux Berlusconi, Salvini, mais on ne s’en rend plus trop compte aujourd’hui car c’est un point de détail dans l’histoire des médias.
Vous aimez aussi faire remonter à la surface des personnages qui n’ont pas eu la gloire qu’ils méritaient.
Oui. J’ai écrit, par exemple, une chronique sur Evelyne Axell, une peintre namuroise décédée très jeune mais qui était une sommité du pop art en son temps et qui a été complètement oubliée. Elle a été réhabilitée il n’y a pas très longtemps grâce à une rétrospective à Namur. J’aime creuser dans l’amnésie collective. Je ne suis pas spécialement militante, mais qu’on le veuille ou non, dans l’histoire, dans les médias, en particulier, d’autant plus aujourd’hui où tout s’accélère, j’ai l’impression que les femmes sont encore plus victimes de ça. C’est donc bien de les ramener sur le devant de la scène.
Dans le même genre, vous êtes d’ailleurs en train d’écrire un ouvrage sur les femmes qui ont révolutionné la cuisine. C’est la même idée ?
En fait, avant de commencer cet ouvrage, j’étais retombée sur l’histoire de Julia Child, l’Américaine qui a popularisé la cuisine française aux États-Unis. À partir de ça, je me suis rendu compte qu’il y avait des milliers de femmes dont on ne parle jamais. On ne sait pas que le concept de cuisine équipée a, par exemple, été inventé par une femme autrichienne, designeuse communiste, géniale : Margarete Schütte-Lihotzky. On ne sait pas, non plus, que la bière est, à la base, un commerce de femmes. Il y a plein de choses qu’il faut rappeler. Il faut toujours taper sur le clou.