"Jodie Foster connaît tellement bien l’industrie du cinéma qu’elle croit pouvoir la faire évoluer"
Publié le 10-06-2021 à 15h48 - Mis à jour le 13-06-2021 à 11h32
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Jodie Foster, Hollywood dans la peau / Arte, 22h45. Camille Juza coréalise un portrait contrasté de Jodie Foster, cette actrice issue des studios hollywoodiens qui tenta de faire évoluer le système de l’intérieur.
Étiez-vous fan de Jodie Foster avant de vous pencher sur sa carrière ?
Je suis née en 1976 et j’étais ado quand j’ai découvert Jodie Foster au cinéma en 1992 dans Le Silence des agneaux. Ce film de genre minimaliste mais très impressionnant demeure mon film préféré. J’ai gardé depuis un œil attentif à sa carrière, à ce qu’elle produisait ou réalisait, toujours en attendant son retour. L’étrangeté de Jodie Foster, c’est qu’elle est une grande actrice, une grande figure de l’industrie audiovisuelle qui a beaucoup tourné, mais qu’elle n’a que quelques grands films, quelques moments d’épiphanie dans sa filmographie. J’aime beaucoup aussi Panic Room de David Fincher.
Comment êtes-vous arrivée sur le projet ?
Je réalise des documentaires pour Arte, qui voulait travailler avec Yal Sadat, critique aux Cahiers du cinéma. Et nous avons eu envie de nous pencher sur cette actrice, qui était bizarrement sous les radars. Sa vie a été très documentée depuis qu’elle est toute petite, mais il n’y avait pas de livre, par exemple, qui rassemble cette histoire hollywoodienne. Un ouvrage qui raconte, et c’est ce qui est le plus important pour nous, qu’elle était en train de faire œuvre à travers les films qu’elle avait choisis, comme actrice, cinéaste, productrice ou distributrice. Tous les grands acteurs ne le font pas. C’est pour cela que notre documentaire ne s’intéresse pas trop à sa biographie, ne raconte pas les deux enfants qu’elle a eus, façon tabloïd.
Vous mettez l’accent sur cette double image, d’un côté l’actrice née, de l’autre, l’intellectuelle qui est allée à Yale.
Jodie Foster est à la fois une enfant actrice mais inconnue, un soutier de l’industrie audiovisuelle, et ensuite elle devient star à l’adolescence et c’est rare de survivre à une enfance trop exposée. Beaucoup finissent en désintox… Jodie Foster continue sa carrière une fois adulte. L’autre chose étonnante, c’est que si sa mère court les castings et l’expose, cette dernière a divorcé et vit avec une femme, manifeste pour les minorités sexuelles, raciales, et protège sa fille. En l’envoyant au lycée français de Los Angeles, en l’incitant à être première de la classe. Tout aurait pu amener l’actrice dans le cinéma indépendant, et d’ailleurs elle est très attachée au Nouvel Hollywood, à ce moment où le cinéma indépendant prend le pouvoir. Elle aurait pu partir à New York, mais elle est profondément californienne, elle vit toujours à Los Angeles, et elle connaît tellement bien l’industrie du cinéma et ses ficelles qu’elle croit pouvoir la faire évoluer de l’intérieur.
Vous ne l’avez pas rencontrée ?
Non, nous lui avons écrit une longue lettre pour la prévenir que nous allions faire un film sur son œuvre, et que, vu son histoire, on se doutait bien qu’il était fort peu probable qu’elle nous reçoive. Elle tient une ligne très stricte de discrétion, de pudeur. Elle nous a juste dit qu’elle aimait beaucoup Arte. À cause du confinement, nous n’avons pas pu aller aux États-Unis et filmer les lieux comme prévu. Nous avons rencontré, en France, Clovis Goux, auteur de Chère Jodie, un roman sur l’affaire Hinckley (ce fan de Jodie Foster qui tira sur le Président Reagan en 1981, NdlR), ainsi que Jordan Mintzer, spécialiste de l’histoire de Hollywood, et Ruby Rich, une enseignante américaine et critique de cinéma venue vivre en France au moment du confinement.