Swann Borsellino : "En France, je pourrais me lever tôt pour obtenir le privilège que la Belgique m'a offert"
Le consultant de la RTBF affirme qu'il "reste un supporter de l’équipe de France".
Publié le 26-06-2021 à 11h45 - Mis à jour le 27-06-2021 à 12h16
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Bouille de gamin, verbe haut et débit du même acabit, tee shirts de la génération Y, gel pour maintenir la houppette, Swann Borsellino a déboulé tel un OVNI dans le paysage audiovisuel belge lors de la Coupe du monde 2018 en Russie. Aujourd’hui bien installé à la RTBF mais aussi sur Eleven, ce Parisien connaît les horaires du Thalys par cœur. Il a profité de deux jours de pause avant les huitièmes de finale ("et après treize jours d’affilée particulièrement intensifs", précise-t-il) pour se poser, accueillir sa famille de passage mais aussi jouer au padel avec Benjamin Deceuninck. Interview.
Saviez-vous dans quoi vous vous lanciez en débutant à la RTBF ?
Quand Michel Lecomte a osé, car c’était un véritable pari, me mettre à l’antenne en 2018, j’avais une fausse idée de la télévision. Je pensais qu’il suffisait de s’installer autour d’une table et de parler foot. Aujourd’hui, je me rends compte de l’équipe qui bosse autour mais aussi du stress au fil des jours. Je n’intègre jamais mon lit avant deux heures du mat’.
Le rythme actuel est plus intense qu’en temps normal où vous êtes plutôt un "intermittent" du monde du spectacle foot. Entre Paris, où vous vivez, et Bruxelles, où vous effectuez des minitrips.
Depuis la rentrée 2020, j’officie lors des soirées de l’Europa League sur la RTBF mais aussi sur le championnat de Belgique sur Eleven. Je rejoins Bruxelles deux fois par mois pour de gros week-ends de quatre jours. Durant des mois, prendre le Thalys n’a pas été une sinécure à cause notamment des tests. J’habite à l’hôtel où j’ai longtemps été le… seul client. Je remercie d’ailleurs le patron, Philippe, d’avoir allégé ma solitude.
A bientôt 30 ans, vous avez créé votre boîte dans laquelle vous intégrez des collaborations foot, notamment avec des billets pour le magazine So Foot, mais aussi votre "autre" job auprès d'Adidas International où vous "écrivez des histoires", comme vous dites. Depuis votre jeunesse, vous mangez du foot matin, midi et soir. Et vous êtes capable d’en parler matin, midi et soir. Avec un accent qui trahit votre nationalité. La revendiquez-vous ?
Je suis et je reste un supporter de l’équipe de France. C’est elle qui me fait vibrer. Même si j’ai des amis en Belgique, je suis Français. En cas de match France-Belgique (ndrl : pas avant une nouvelle fois la demi-finale), je ne modifierai pas mon approche même si je nourris davantage d’inquiétudes qu’en 2018. Les chances noir-jaune-rouge ont augmenté. Les tauliers sont là : De Bruyne, Lukaku, Courtois, Hazard…
Impossible de passer sous silence la récente guéguerre par médias interposés entre deux pays qui, pourtant, s’apprécient. Les noms d’oiseaux ont volé et les invectives caricaturales aussi.
Je n’aime pas en parler parce que je ne me sens pas concerné. Cela n’a aucune importance. C’est même idiot. De part et d’autre. Se charrier avant un match, cela fait partie du folklore du football mais il y a des limites. J’en suis la preuve vivante en tant que supporter parisien… de l’OM.
Parlons quand même que cet Euro qui, après un premier tour en forme de zakouskis, entame enfin le plat de résistance.
J’entends beaucoup de critiques sur la présence de 24 équipes. Moi, ça me plaît. Le niveau global est plutôt bon pour une année post-Covid. Nous n’avons pas eu droit à beaucoup de mauvais matches. Des équipes comme la Finlande et la Macédoine du Nord, qui découvraient une phase finale, n’ont pas volé leur place. Certes, certaines formations ont été décevantes comme l’Angleterre ou la France avec qui je peux être très critique, mais d’autres m’ont tapé dans l’œil comme l’Italie, les Pays-Bas ou le Danemark.
De là à soutenir aussi l'Italie, puisque votre mère est sicilienne ?
Chez moi, il n’y a pas de dilemme. Je pars du principe qu’en foot, on ne peut être supporter que d’une seule équipe. Moi, c’est la France. Maman comprend. Lors de la défaite en finale de la Coupe du monde 2006 lors des tirs au but contre… l’Italie, j’étais triste comme la pierre.
Croyez-vous aux chances des Diables face au Portugal ce dimanche ?
Je pense qu'il faut se concentrer sur le fait que la Belgique peut faire mal à la défense portugaise. Selon moi, le coté Guerreiro-Sanches-Jota est crucial, car le flanc droit belge est très offensif et il faudra garder un œil en permanence sur ce trio. Le travail de Witsel sera essentiel, car la France a laissé trop d'espace à Sanches et Moutinho selon moi. Finalement, Ronaldo est le joueur qui finit les actions mais son influence sera moindre si le boulot est fait.
La France reste-t-elle le grand favori malgré les blessures qui touchent certains de ses défenseurs ?
Dans le cas où Lucas Hernandez serait sérieusement touché au genou (ce que les premiers tests n'indiquent pas), ce serait un sérieux coup dur pour la France. Il a montré contre l'Allemagne et globalement depuis son essor en Bleu qu'il était un défenseur hors normes. Sans Lucas Digne pour le remplacer, la France serait forcément plus en difficulté. Je pense que l'on pourrait éventuellement s'en passer contre la Suisse mais, par la suite, ce serait un coup dur. Cela étant, je pense que la France demeurerait l'un des favoris, même si elle ne m'a pas convaincu depuis le début de l'Euro.
En télé plus qu’en presse écrite, le look, du moins l’apparence compte. La vôtre est volontairement décontractée. Votre image jeune dépoussière-t-elle le gang des costards-cravates ?
Rien n’est calculé. Je m’habille en télé comme à la ville. Personne ne me prête de vêtements, c’est ma propre garde-robe. Parfois, avec mes tee-shirts, cela se voit… Je suis comme je suis. Je ne suis pas clivant. J’espère ne pas parler qu’aux jeunes. L’important est ce que je dis et non ce que je représente.
A l’heure où le talent belge a envahi l’Hexagone, vous avez effectué le trajet inverse. Et vous semblez ne pas vous prendre la tête...
Je me pince tous les jours. Je peux parler de foot à la télévision. Je ne remercierais jamais assez la RTBF de m’avoir permis de réaliser mon rêve. Mercredi soir, j’ai pu commenter un match de l’équipe de France. Dans mon pays, je pourrais me lever tôt pour obtenir un tel privilège.
Votre notoriété noir-jaune-rouge n’a apparemment pas (encore ?) franchi la frontière. Pourtant, vous faites de la télé dans un sport de passionnés mais plus confidentiel que le foot.
Je commente les fléchettes (en Belgique, on parle de darts) sur L’Equipe TV. Estelle Denis, la célèbre journaliste (accessoirement Madame Raymond Domenech à la ville) m’a un jour interpellé en me disant : 'je ne savais pas que tu t’y connaissais en foot'. Preuve que je n’existe pas en France télévisuellement.