Les gardiens de la forêt amazonienne: enquête au cœur des luttes indigènes
"Enquête au cœur des luttes indigènes", un documentaire à découvrir ce mardi sur Arte, à 20h50.
Publié le 28-07-2021 à 17h26 - Mis à jour le 01-08-2021 à 14h07
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/4URBJZ6UR5G3PIAJJFNP7D6XIA.jpg)
Depuis 14 000 ans, les populations autochtones d’Amazonie cohabitent en bonne intelligence avec la forêt et n’en ont déboisé que 1 %. Les 20 % déboisés au Brésil depuis 1970 sont le fait de l’exploitation forestière, pour accueillir de l’élevage, construire des barrages, des centrales ou des autoroutes. À ces 20 %, s’ajoutent près de 20 autres quasiment ravagés par l’exploitation humaine et les incendies de forêt. Or, les scientifiques estiment à 40 % le point de non-retour, ce seuil au-delà duquel la forêt risque d’être perdue à jamais, laissant place à la savane, avec des conséquences catastrophiques pour la biodiversité et le changement climatique.
Alors que le gouvernement de Jair Bolsonaro ne semble pas œuvrer, depuis son arrivée en 2019, en faveur de la protection de la forêt et de ses habitants, le réalisateur brésilien Estevão Ciavatta tire la sonnette d’alarme avec ce documentaire propre à remuer les consciences. Et quel meilleur canal pour appuyer son plaidoyer que le combat des indigènes eux-mêmes, qui ont commencé à délimiter eux-mêmes leur territoire en 2014, devant l’inaction du gouvernement pour protéger leurs terres.
Auto-démarcation
Le réalisateur s’est donc embarqué dans une enquête au long cours et a suivi pendant cinq ans les actions menées par la tribu des Munduruku, qui a commencé par protester, en s’associant à d’autres tribus, contre la construction d’une série de barrages sur la rivière Tapajós, dans l’État du Pará. Après avoir gagné la confiance de leur chef, Cacique Juarez, Estevão Ciavatta leur a même confié une partie des images, en mettant des caméras à la disposition de leur collectif audiovisuel, géré par des femmes. Ces dernières sont notamment à l’origine de cette séquence unique au cours de laquelle les Munduruku parviennent, dans un bras de fer risqué, à faire reculer les hommes et les machines qui menacent leurs terres.
Ce que révèle avant tout ce documentaire passionnant, nourri des paroles de sagesse d’un anthropologue ou des Indiens eux-mêmes, c’est l’existence d’un vaste réseau du crime organisé qui permet à des spéculateurs de s’approprier les terres appartenant au domaine foncier public, pour pouvoir les revendre ensuite selon la méthode du grilagem, sur base de faux documents et d’intimidation. Cette gangrène, qui accélère la déforestation sauvage et génère de violents conflits agraires, est bien combattue par l’Ibama (l’Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles renouvelables). Mais cette brigade, dont le réalisateur a filmé quelques opérations de contrôle, n’est pas assez puissante pour combattre les clans mafieux, dont les méthodes sont exposées ici grâce à une série d’écoutes téléphoniques.