Ces petits escrocs sans diplôme ont vidé les caisses de l’État français : retour sur l'affaire des "quotas carbone"

Les entreprises les plus polluantes se voient attribuer des quotas. Si elles n'atteignent pas leur plafond, elles peuvent revendre ou racheter ceux des entreprises qui n'ont pas dépensé les leurs. Le marché s'ouvre à toutes les sociétés. Alors, des fraudeurs achètent, hors taxe, des quotas de CO₂ et les revendent TVA comprise (19,6 %) en prenant soin de disparaître avant que l'État français ne leur réclame le remboursement de la TVA perçue. L'affaire avait inspiré un polar à Olivier Marchal, Carbone.

Petits génies des montages financiers

Dans Les Rois de l'arnaque , Netflix revient sur une bande de pieds nickelés de l'escroquerie, Marco Mouly en tête. Issus du quartier populaire de Belleville, à Paris, ils connaissaient déjà le système. En multipliant les achats et les ventes de tonnes de CO₂ sans jamais reverser la TVA, ces aigrefins montent une escroquerie fiscale particulièrement lucrative, à très grande échelle, en utilisant Israël comme base arrière. Marco Mouly, Samy Souied et Arnaud Mimran flambent l'argent qui coule à flots dans "les casinos de Las Vegas ou dans des parties de poker à 400 000 euros le jeton, en montres de grands horlogers et autres Ferrari, Rolls et Lamborghini. Ce qu'ils perdent, ils le regagnent le lendemain. Pour la bar-mitsvah de son fils, Arnaud Mimran s'offre les services de Puff Daddy et de Pharrell Williams, Patrick Bruel et Gad Elmaleh jouent les Monsieur Loyal et chacun des 600 invités reçoit un iPad en guise de carton d'invitation. L'heure est à la démesure", rapportait Le Monde.

Meurtres irrésolus

Marco Mouly, hâbleur au langage fleuri, est un personnage central du documentaire. Face à cette folle entreprise, les placides juge Van Ruymbeke, Bernard Petit, ex-patron du "36 quai des orfèvres", et le procureur Patrice Amar livrent leur point de vue.

À la réalisation, Guillaume Nicloux, "auteur et réalisateur de nombreux films, du cinéma expérimental au triptyque noir, de la comédie décalée au film politique, du drame au faux documentaire", résume son agent. Celui qui réalisa notamment Thalasso avec Michel Houellebecq et Gérard Depardieu signe un documentaire qui tient entre La Vérité si je mens et Casino de Scorsese. Un objet drôle et sans retenue, truffé de répliques cultes et d'attitudes insolites capturées de gré ou de force. Ce n'est pas le cinéma du réel, mais une manière de faire du cinéma avec la réalité, tantôt racoleuse, clinquante, sirupeuse, afin de passer un peu le temps et de tenter d'échapper à la réalité. Bref, le genre Netflix.

Même si le documentaire peut séduire, il est loin d'occulter les enquêtes de nos confrères du Monde, de Vanity Fair, de L'Obs, de Challenges et de Media part qui permettent de comprendre les dessous de l'affaire autant que de la révéler. Arnaud Mimran, ancien trader, était réputé pour ses amitiés haut placées, notamment avec l'ex-Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, avait notamment révélé Media part . Condamné à huit ans de prison pour une vaste escroquerie à la "taxe carbone", le financier avait été mis en examen et placé en détention provisoire dans le cadre de l'enquête sur l'assassinat, en 2011, de son ancien beau-père, le milliardaire Claude Dray, et de celle sur le meurtre, en 2010, d'une autre figure de l'affaire de la "taxe carbone". Samy Souied avait été abattu par deux tueurs en scooter après une virée à Las Vegas. Arnaud Mimran nie toute implication dans ces deux dossiers.