"Poutine, le retour de l’ours dans la danse": un documentaire pour comprendre ce qui se joue en Ukraine
Poutine utilise sa politique extérieure comme outil national.
Publié le 15-02-2022 à 16h15
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La Russie est-elle vraiment prête à envahir l'Ukraine dans les heures qui viennent ? Si l'on en croit les États-Unis, ce n'est plus qu'une question de jours. L'administration Biden évoque même un jour, ce 'mercredi', et a demandé à tous les ressortissants américains - dont l'essentiel de sa représentation diplomatique à Kiev - de quitter le pays. Une douzaine de pays ont suivi, dont l'Australie, le Canada et plusieurs pays européens dont la Belgique", rappelait notre confrère Christophe Lamfalussy, dans nos pages internationales de ce lundi.
Pour comprendre la partie de poker mondiale qui se joue actuellement, Poutine - Le retour de l'ours dans la danse tombe à pic. Le documentaire de Frédéric Tonolli, prix Albert-Londres en 1996, offre avec intelligence une analyse des enjeux d'un tel bras de fer en s'appuyant sur les témoignages pertinents d'acteurs et d'observateurs russes et français.
Blessures de trahison et d’humiliation
Lors de la réunification de l’Allemagne, des promesses ont été faites : l’Otan ne se rapprocherait pas des frontières de la Russie. Malgré l’engagement fait à Gorbatchev, l’Otan poursuit son avancée vers l’est. Pologne, Hongrie, République tchèque, Roumanie, Bulgarie, pays baltes rejoignent le bloc de l’Ouest. Un encerclement, une trahison, une véritable rupture de contrat pour Poutine qui, au début de son mandat, avait pourtant cherché à se rapprocher du camp occidental.
Février 2007, premiers coups de semonce. À la tribune de la Conférence de Munich pour la sécurité mondiale, il dénonce avec force l’unilatéralisme des États-Unis. La Russie revient de plain-pied dans les affaires du monde en tant que puissance non alignée, indépendante.
Géorgie, Ukraine, Crimée, Syrie…
La grande affaire de Vladimir Poutine, c’est la politique étrangère, son outil de cohésion nationale, une fierté retrouvée. Et pour mieux prendre à revers ses adversaires, il s’immisce dans les failles de la géopolitique mondiale. Pour lui, un régime autoritaire est préférable au chaos, à l’imprévisible. En 2011, les Printemps arabes en Tunisie, Libye, Égypte, Syrie, inquiètent Moscou. Pour le président de la fédération de Russie, Washington a organisé la chute des Ben Ali, Kadhafi et Moubarak. Ce vide pourrait favoriser l’arrivée des islamistes au pouvoir. En 2015, à la grande surprise générale, les forces russes s’engagent en Syrie aux côtés de Bachar al-Assad, afin de stopper cette contagion. La Russie orthodoxe gagne de nouveaux amis au Proche et Moyen-Orient pour devenir un élément incontournable de toute négociation.
Sécurité contre business
Le 15 septembre 2011, à Benghazi, Nicolas Sarkozy aux côtés du philosophe Bernard-Henri Lévy promettait : "La France, la Grande-Bretagne, l'Europe seront toujours aux côtés du peuple libyen." L'intervention militaire devait amener démocratie et prospérité. Avec la disparition de Kadhafi, elle a semé le chaos. Tromperie, trahison, hypocrisie : Poutine dresse un miroir à la face de l'Occident. Et il positionne la Russie comme le nouveau partenaire idéal.
Il ne fait pas de leçon de morale, mais il assure la sécurité de ses partenaires. C’est ainsi qu’il intervient en République centrafricaine. En contrepartie, il exige des marques de loyauté et l’accès pour ses entrepreneurs aux mines. Un soutien militaire en échange d’une licence d’exploitation minière. Déjà trente pays d’Afrique ont signé avec le Kremlin un accord de coopération militaire. L’enjeu énergétique, qui n’est pas développé dans ce documentaire, pourrait aussi jouer dans le sort réservé à l’Ukraine.
Poutine - Le retour de l’ours dans la danse, ce mardi soir sur Arte, à 22 h 40.