Bob Dylan roule toujours

Il y a des gens à qui les années 2000 vont bien. Bob Dylan s’y sent comme un poisson dans l’eau et "Together Through Life", nouvel album en magasin vendredi, vaut plus que le détour. Génial... ou pas All Access, le blog musique de la Libre

Dominique Simonet
Bob Dylan roule toujours
©D.R.

Il y a des gens à qui les années 2000 vont bien. Bob Dylan s’y sent comme un poisson dans l’eau et "Together Through Life", nouvel album en magasin vendredi, vaut plus que le détour. Pour impressionner, il devait faire fort, ce disque, car il suit "Love and Theft" (2001) et "Modern Times" (2006), soit ce que Robert Allen Zimmerman avait fait de mieux depuis un quart de siècle ("Desire", 1976). Eh bien, "Together Through Life" est encore mieux.

Le disque est parti d’une chanson, "Life is Hard", écrite à la demande du réalisateur Olivier Dahan ("La Môme"), pour son futur film américain, "My Own Love Song", présenté comme un "road movie". Chez Dylan, motard devant l’Eternel (ça lui a joué de vilains tours), l’inspiration colle à la route.

Emballez, c’est pesé

En moins de temps qu’il n’en faut pour brancher les microphones, le disque a été emballé-pesé, comme les deux précédents, avec les musiciens de la tournée "sans fin", Donny Herron (steel guitar, banjo, trompette), Tony Garnier (basse) et George Recile (batterie). Des habitués qui peuvent se laisser aller à swinguer en roue libre, qualité essentielle manquant aux deux précédents opus.

Invités à la fête, Mike Campbell, guitariste des Heartbreakers de Tom Petty (souvenons-nous des Traveling Wilburys), ainsi que David Hidalgo, piano à bretelles chez Los Lobos. L’un comme l’autre vous mettent une de ces ambiances de derrière les bayous. Signée Jack Frost, soit Dylan lui-même, la réalisation préserve cette spontanéité, dans un climat poisseux d’humidité surchauffée.

Ça tombe bien, la tonalité générale du disque est d’un blues comme il n’en pullule que sur les bords du Mississippi ("My Wife’s Home Town"), avec des variantes boogie ("Jolene"), tex-mex ("This Dream of You"), cajun ("It’s all Good"). Un gumbo du meilleur goût, épicé par la voix de plus en plus exécrable du vieux Zim, 68 ans le 24 mai prochain tout de même. L’homme n’ a jamais été un grand chanteur. Genre, il a même bousculé quelques canons esthétiques. Cette voix de grenouille enrouée fait pourtant toujours mouche.

A preuve, en 2006, "Modern Times" fut numéro un aux Etats-Unis, ce que Zim-Zim n’avait plus réussi depuis "Desire", encore lui. Comment expliquer que ses facultés de mélodiste et d’auteur soient à nouveau telles ? Dylan a-t-il évacué ses vieux démons ou, mieux, trouvé les dérivatifs appropriés ? Avec pour thèmes récurrents la mémoire et l’amour, "Together Through Live" est noir et sarcastique. Il plonge dans l’actualité : "Les gros politiciens disant des mensonges, les cuisines des restaurants pleines de mouches", "It’s All Good", répète-t-il de façon incantatoire, comme une magie noire vaudou. Ce pourrait être sinistre. Pourtant, comme tout l’album, ça donne juste envie de baisser les vitres et de prendre la route, nez au vent. Comme Dylan, "Like a Rolling Stone".


"Together Trough Life", Bob Dylan, Columbia/Sony Music.

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