"Atteindre la beauté grâce au collectif"

Entretien Martine D. Mergeay
"Atteindre la beauté grâce au collectif"

La Chorale royale protestante de Bruxelles fête ses 75 ans avec un concert.Cénacle de chanteurs amateurs, creuset d’innombrables vocations, gardienne du temple, exploratrice de nouveaux répertoires, et, last but not least, phalange de réputation internationale, la Chorale royale protestante de Bruxelles fête cette année ses 75 ans. A cette occasion, elle s’est associée à deux autres chorales européennes pour donner le "Requiem" de Verdi (dimanche au Bozar). Rencontre avec Daniel Burdet - médecin, musicien et théologien, natif de Genève -, chef de l’ensemble depuis 1985, et de Laurent Fobelets, son successeur désigné.

Fondée en 1942 - en pleine Deuxième Guerre mondiale - par le théologien et musicien Fritz Hoyois à l’intention des jeunes de la paroisse protestante Belliard, la Chorale garde aujourd’hui toute sa vitalité. Comment faites-vous ?

Daniel Burdet : Le recrutement est ouvert à tous ! Il se fait par auditions, sur base de critères précis : la qualité et la pureté de la voix, la justesse, la capacité de lire la musique, l’âge (moins de 60 ans à l’entrée) et - très important ! - l’engagement dans la durée, indispensable à la cohésion sonore et artistique du chœur. Nous organisons en outre des auditions de contrôle tous les cinq ans, avec un jury extérieur, notant que, quoi qu’il advienne, 70 ans est l’âge de la retraite… Je montre l’exemple avec un peu d’avance (rires) en passant le flambeau à Laurent Fobelets, tout comme Fritz Hoyois l’avait fait avec moi en 1985. Au bout de 75 ans, Laurent sera seulement le troisième chef, cela tient du record, c’est aussi un signe…

Laurent Fobelets : Notre mission : maintenir l’attention des chanteurs, leur désir, leur ouverture, et transmettre les valeurs musicales, humaines et spirituelles de la Chorale.

D’où viennent vos chanteurs ?

D. B. : Des académies et des conservatoires, mais aussi de la société "civile" via le bouche-à-oreille. Nous sommes aujourd’hui un noyau équilibré de quarante-cinq chanteurs, ce qui fait figure d’exploit dans une société où la musique et le chant ont quasi disparu de l’école.

Fritz Hoyois défendait particulièrement la musique de Bach mais, depuis votre arrivée, le répertoire de l’ensemble s’est considérablement élargi.

D. B. : A preuve : ce Requiem de Verdi, que nous répétons assidument depuis le mois de juin ! D’autre part, étant moi-même compositeur, j’ai ouvert le chœur à la musique contemporaine - citons Honegger, Arvo Pärts, Michael Tippett ou Frédéric Van Rossum - tout en évitant des partitions trop complexes, trop longues à monter pour des amateurs.

Quel est aujourd’hui le sens d’une chorale comme la vôtre ?

D. B. : Le simple fait de se retrouver chaque lundi, venant de tous les horizons et de toutes les conditions sociales, est en soi une ouverture sur le monde. Nous sommes notre propre instrument, et donc libres.

L. F. : Par l’engagement, la solidarité, le collectif, nous touchons ensemble à la beauté, c’est une expérience très forte.

D. B. : En tant que protestant, j’ajouterais que cet engagement fait partie de notre responsabilité - parfois écrasante - dans le monde individualiste qui est le nôtre.

Avec Evelyne Bohen, Inez Carsauw, Sébastien Romignon-Ercolini, Jérôme Vanier. Bruxelles, Bozar, le dimanche 26 novembre à 20h15. Infos : www.crpb.be ou www.bozar.be

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