Verdi gagné par les instruments anciens
- Publié le 06-12-2018 à 08h45
- Mis à jour le 06-12-2018 à 08h46
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Au Théâtre des Champs-Élysées, une splendide "Traviata" avec un diapason abaissé.Les instruments d’époque seraient-ils en train de conquérir de nouveaux territoires ? S’ils avaient depuis longtemps quitté les terres du baroque pour redynamiser le répertoire classique puis la symphonie romantique, allant jusqu’à redonner de nouvelles couleurs à Debussy, les "baroqueux" n’avaient jusqu’ici que rarement œuvré, et moins encore convaincu, dans le grand opéra italien du XIXe. Et voilà qu’arrivent, coup sur coup, deux réalisations verdiennes marquantes.
La première est un disque : Macbeth gravé par Fabio Biondi et son ensemble Europa Galante. Une version certes imparfaite, notamment en raison d’une distribution très inégale (la Lady Macbeth de Nadja Michael est peu fiable), mais passionnante parce qu’elle propose l’opéra dans sa version originale de 1847, et surtout avec des équilibres sonores différents et une direction à l’énergie renouvelée.
La deuxième réalisation est une Traviata actuellement donnée au Théâtre des Champs-Élysées à Paris. Dans la fosse, Jérémie Rhorer dirige le Cercle de l’Harmonie avec des instruments tels qu’on les trouvait en 1850, comme par exemple des flûtes traversières en bois mais pourvues de six clés. L’orchestre est également accordé avec un la au diapason à 432 Hz, au lieu du 440 à 444 Hz habituellement pratiqué aujourd’hui. Fondée sur une véritable réflexion musicologique bien expliquée dans le programme de soirée (avec des extraits à découvrir par un QR code !), cette option se révèle probante : l’orchestre ne couvre jamais les chanteurs, et les voix (qui, dans le même souci d’authenticité, renoncent aux suraigus de fin d’airs souvent pratiqués mais non écrits par Verdi) s’épanouissent avec plus de naturel.
Violetta, la belle surprise
Bien encadrée par l’Alfredo du ténor albanais Saimir Pirgu et le Germont du baryton français Laurent Naouri, la soprano française Vannina Santoni réussit une belle prise de rôle en Violetta, timbre rond, virtuosité aisée et expressivité idéale. Elle bénéficie aussi de la belle mise en scène de Deborah Warner : tout en partant d’un concept risqué (une sorte de flash-back dans un hôpital, où l’héroïne est flanquée d’un double, comédienne silencieuse), la grande dame du théâtre anglais signe un spectacle d’une grande beauté visuelle, grâce notamment aux superbes lumières de Jean Kalman. Insufflant dans chaque scène une direction d’acteurs tracée au cordeau, elle renouvelle également notre vision de l’œuvre.
3 CD Glossa/Outhere. Paris, Théâtre des Champs-Élysées, les 7 et 9 décembre, www.theatrechampselysees.fr