Donizetti refait sourire la Monnaie
- Publié le 11-12-2018 à 07h55
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Altinoglu et Pelly signent une réjouissante version de Don Pasquale.Ouf ! Après une Flûte enchantée dont la pesanteur fut inattendue et un De la maison des morts inévitablement plombant, le public de la Monnaie retrouve avec Don Pasquale le plaisir de se divertir à l’opéra. Et de rire. Un spectacle bienvenu pour les fêtes de fin d’année d’autant que, l’an dernier à pareille époque, l’Opéra national proposait les plus liturgiques mais moins riants Dialogues des carmélites.
Créée à Sante Fe et donnée déjà à Barcelone, la mise en scène de Laurent Pelly est une nouvelle réussite. Dans les décors simples mais astucieux de Chantal Thomas (une rue de village aux éléments ajourés de persiennes entre lesquels s’inscrit, sur un plateau tournant, le salon de Don Pasquale, que l’on retrouvera complètement renversé au deuxième acte), Pelly caractérise de façon très aboutie chacun des quatre personnages, évitant les caricatures habituelles : un Don Pasquale hypocondriaque et plus résigné qu’antipathique, un Ernesto charmant mais plutôt paresseux, un Malatesta façon voyageur de commerce tiré à quatre épingles et une Rosina peu raffinée qui lit romans à l’eau de rose quand elle chante Quel guardo il cavaliere.
Comme toujours chez le metteur en scène français, la direction d’acteurs est inventive et extrêmement précise, jusque dans les très rares pages de chœurs. Pelly ne va pas chercher midi à quatorze heures, ni n’impose de concept ou de relecture : il se contente, simple et humble, de raconter l’histoire en prenant soin de donner une traduction visuelle à chaque sentiment, chaque inflexion et parfois même aussi à chaque détail de la partition. Dès lors, ce qui semble lourd et trivial dans tant d’autres productions de l’œuvre pétille ici et séduit par sa légèreté.
Sourire aux lèvres
Mais le succès de la soirée tient aussi à la lecture élégante et nette d’Alain Altinoglu, visiblement ravi d’être là, dirigeant le sourire aux lèvres, attentif tout autant à ses solistes qu’aux musiciens de son orchestre. Dans le rôle-titre, Michele Pertusi, voix de bronze et virtuosité sans faille, campe, sans jamais tomber dans l’excès ou la vulgarité, un Don Pasquale plus complexe qu’à l’accoutumée. Habituée du rôle de Norina - qu’elle a notamment chanté au festival de Glyndebourne -, Danielle De Niese réussit de très convaincante manière sa transformation de jeune fille rangée en virago dominatrice : après un début qui fait craindre une certaine fragilité dans l’aigu, la voix charme et impressionne par le fruité et la rondeur de son timbre. Si Joel Prieto est un Ernesto séduisant, ses aigus manquent parfois de précision.
Très sûr et constamment fiable, le Malatesta de Lionel Lhote force, en revanche, l’admiration : le baryton borain est bien l’une des valeurs sûres du chant belge à l’international, et on se réjouit de l’entendre prophète en son pays. Restera à découvrir, dans la deuxième distribution en alternance, la Norina de l’autre Wallonne de la distribution : Anne-Catherine Gillet.Nicolas Blanmont
La Monnaie, jusqu’au 23 décembre ; www.lamonnaie.be