Concours Reine Elisabeth : Daniel Kogan et Stephen Kim, la nuit et la lumière
- Publié le 07-05-2019 à 18h19
- Mis à jour le 07-05-2019 à 18h23
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En récital, Elly Sue rivalise avec Protée, Stella Chen fonce et rayonne.
Le Canadien (d’origine russe) Daniel Kogan, 26 ans, ouvre cette deuxième journée de demi finale, avec le 5e Concerto K. 219 de Mozart (qu’on entendra quatre fois aujourd’hui). Il donne d’emblée le ton, avec une introduction tendue, mystérieuse, aux limites de l’étrangeté, avant de s’élancer dans un allegro bondissant, traversé, au loin, par cette mélancolie qui signe toute la musique de Mozart. Avec, en prime, une cadence de son cru, sous forme de bataille (fraternelle) avec les deux premiers violons... De quoi annoncer un Adagio qui se révélera effectivement d’une extrême subtilité : sonorités fines mais corsées, incessantes trouvailles, intensité. Le Rondeau, dans son apparente simplicité, prendra des accents tout neufs, mené dans un climat d’évidence aux côtés d’un orchestre très inspiré.
Tout autre proposition avec Stephen Kim, 23 ans, américain d’origine coréenne dont, au premier tour, nous avions apprécié le raffinement et la profondeur. Lui-aussi signe les cadences (fort séduisantes) et si son approche est globalement moins surprenante, ou du moins plus univoque que celle de son confrère canadien, on notera chez lui, outre la belle agogique, des sonorités pures et lumineuses, un certain refus de legato et un naturel désarmant. Mozart, c’est aussi ça.
Le premier récital sera donné par l’Américaine d’origine coréenne Elly Suh, 29 ans (demi-finaliste en 2015) qui, quoique rivée à la partition, donne de la pièce de Bram Van Camp une version très fouillée, aux climats clairement contrastés et expressifs. Les mêmes qualités ne serviront pas la Sonate K. 303 de Mozart, selon nous hors style et incompréhensible de bout en bout (notamment dans le dialogue avec Thomas Hoppe). Étude (III) de Widmann brillante mais indigeste (vif succès), sonate d’Ysaÿe servie par une réalisation parfaite et habitée, et Campanella de Paganini supersonique : la prestation restera pour le moins bigarrée.
L’Américaine Stella Chen, 26 ans, conclut la séance avec un Scherzo-Bagatelle poétique, jazzy, déchaîné, bref : étourdissant et très gai (Victor Asuncion au piano). La Sonate d’Ysaÿe confirmera un tempérament chaleureux et une formidable assurance technique, et quoique inégale, la Fantaisie D. 934 de Schubert offrira un moment d’authentique bonheur musical, ouverte sur un trait pianissimo céleste, et poursuivant avec grâce (ou vigueur) sur le merveilleux thème de Suleika.
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