Le fabuleux destin de Mira Gruszow, luthière
À découvrir cette semaine, à la maison Malibran, dans le cadre de l’exposition "Ekho#3".
- Publié le 08-05-2019 à 08h25
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À découvrir cette semaine, à la maison Malibran, dans le cadre de l’exposition "Ekho#3".
En fait, ils sont deux, Mira Gruszow et Gideon Baumblatt, associés à l’atelier et à la ville, parents de deux enfants, établis à Berlin et pratiquant la lutherie ensemble, au plus haut niveau. Née en 1984, Mira est belge et native du Brabant wallon. "Enfant, j’ai rencontré la musique à travers le violoncelle et mon amour de la musique a toujours été associé à l’objet qui la produisait. Dans mon entourage, j’ai observé combien la pratique de la musique tenait parfois de l’esclavage (!) et j’ai donc opté pour un métier ‘latéral’, à la fois manuel - concret, pratique - et artistique. Après mes humanités à Grez-Doiceau, et une année à l’école de lutherie de Puurs, près de Malines, je suis donc partie à Crémone où je suis restée cinq ans. Là-bas, tous les cours se donnent en italien, l’école de lutherie est intégrée dans une vraie ville de 60 000 habitants, avec une faculté de musicologie, des musées et d’innombrables sources de documentation."
Dans sa chambre
À l’âge où les jeunes filles vivent encore chez leurs parents et ne songent qu’à faire la fête, Mira atteste déjà ses ambitions et son indépendance : "À Crémone, en plus des instruments réalisés à l’école (qui en reste propriétaire), j’ai réalisé chez moi des instruments assez corrects (rires) que j’ai vendus à des élèves de l’académie de Nethen. Et l’été, j’allais travailler chez Jan Strick", un important luthier installé à Bruxelles.
C’est à Crémone que Mira rencontre Gideon Baumblatt - formé à l’école de Mittenwald - mais il faudra attendre que les jeunes luthiers se retrouvent au Québec, quelques années plus tard, pour que le coup de foudre se mue en véritable alliance. Entre-temps, Gideon avait acquis une expérience spécifique à Londres, ville des enchères, des expertises et des réparations, où il avait eu entre les mains les plus beaux instruments du monde. "Montréal s’est révélée intéressante dans la mesure où les Canadiens aiment les instruments contemporains, c’est aussi là qu’est né notre premier enfant, en 2012."
La reconnaissance internationale
En 2014, Mira et Gideon décident de partir à Berlin, où naîtra leur deuxième enfant : "Nous avion envie de revenir en Europe et Berlin est par excellence une ville de musique mais… Berlin abrite aussi une foule de luthiers, et l’Allemagne est hyperconservatrice. L’adaptation fut difficile. Aujourd’hui, ça marche dans la mesure où tous les instruments sont vendus, et à des musiciens venus parfois de très loin. Et le travail est infini… En pratique, c’est généralement moi qui lance les opérations et Gideon qui règle, qui fignole, notre passion est de construire des instruments confortables, à la fois légers et résistants, en leur donnant un maximum de couleurs et surtout en les adaptant le plus finement à la personnalité de nos commanditaires."
Signe de reconnaissance internationale : en novembre dernier, lors du 23e Concours international de lutherie de la Violin Society of America, Mira et Gideon ont reçu deux médailles d’or pour le violon - sonorité et qualité de facture - une médaille d’argent pour le violoncelle, et une médaille d’argent pour l’ensemble du quatuor présenté à la compétition…
Dans le cadre du Concours Reine Elisabeth, l’association Ekho organise une exposition réunissant les instruments et les archets les plus récents de plus de cinquante luthiers et archetiers de toute l’Europe (dont Gideon Baumblatt et Mira Gruszow). Masterclasses (avec le Quatuor Zemlinsky), essais libres et workshops sont également au programme. À la Maison de quartier Malibran, à deux pas de Flagey, du 8 au 11 mai.Martine D. Mergeay
www.cmireb.be ou www.ekho-violins.com