Le marathon de "Pierres" pour l’amour du français
Le chanteur bruxellois livre en solo des récits simples, drôles et poétiques.
Publié le 28-05-2021 à 19h50 - Mis à jour le 04-06-2021 à 11h03
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Il s’appelle Leroy, Pierre Leroy, professeur de français à Bruxelles. Un job "purement alimentaire", assume le principal intéressé, "une rentrée financière stable avant la gloire", ajoute en rigolant l’artiste, qui vit pour la musique, respire pour le théâtre, et s’anime fondamentalement pour le dessin. Autant de facettes que l’homme de 28 ans réunit dans un projet en solitaire, logiquement baptisé Pierres.
On retrouve Pierre l’auteur, qui chante sept comptines douces, heureuses et poétiques ; Pierre l’écrivain, qui ne les sort pas sur disque mais dans un livret aux paroles simples, écrites à la main ; Pierre le dessinateur, qui illustre chaque morceau avec des croquis enfantins. "Moi, j’achète encore des disques, précise-t-il, mais, finalement, je ne les mets jamais dans mon lecteur, parce que c’est plus facile d’aller sur Spotify. Alors, quitte à avoir un objet, autant en faire un livre, le poids écologique est moindre, et y glisser un lien pour télécharger les morceaux."
"Des textes vraiment pauvres"
Le texte est tellement frais qu’il a été imprimé avec des petites ratures, ça fait partie de la démarche. Tout y est écrit et chanté en français, Disque de platine (titre temporaire) est l’œuvre intime d’un francophone, d’un grand gamin à la moustache parfaite, qui prend un plaisir évident à se livrer par poèmes. "L’usage du français s’est imposé naturellement avec l’idée de rester au plus près de moi-même. Le français a quelque chose de plus direct, de naturel, on rentre plus dans la sincérité qui colle au projet. Et puis, utiliser l’anglais pour éviter de se livrer, ça ne marche que dans certains pays (rires). Dès que tu vas dans un territoire anglophone, ils comprennent ce que tu dis, et, si ça tombe, c’est complètement nul. J’ai fait partie d’un groupe dont l’objectif était avant tout de faire de la belle musique. Les paroles, en anglais, n’étaient qu’un prétexte. On a donné un concert au Canada, et on a eu une review qui décrivait nos textes comme ‘vraiment pauvres’ (rires). Alors j’essaie de rééquilibrer les choses ici."
La bourse molle du mardi matin
"Nuage blanc", "Entre-temps", "Le soir" et les autres compilent des petites histoires du quotidien, des récits drôles, touchants ou délirants. "Ma copine y voit un disque d’amour, s’enorgueillit Pierre, un album composé pour elle." C’est en partie vrai. L’autre partie vient d’un jeu entre copains que l’intéressé appelle "Le Marathon". "On part d’un mot ou d’une image, et à partir de ce mot on doit chacun créer une chanson." Ainsi, les termes "bourse molle" (avis aux amateurs du film Les Visiteurs) donnent la chanson "Mardi matin", conte d’amour moderne et gentiment érotique de deux amoureux enlacés.
"J’ai longtemps détesté la variété française, poursuit Pierre Leroy. Puis j’ai découvert Bertrand Belin, et je me suis dit : ‘Purée, il y a moyen de faire des choses avec peu de mots, mais de façon puissante.’ Indirectement, il m’a glissé à l’oreille que je pouvais faire quelque chose d’intéressant, que c’était de l’ordre du possible."
Musicalement, Pierre part bien évidemment dans tous les sens. L’infâme Auto-tune qui métallise la voix et fait le bonheur des chanteurs de R&B côtoie la chanson de Brassens et la bossa nova. Pierre ne se refuse rien, se fait plaisir, et s’offre une petite virée d’une réelle légèreté. "Je suis ouvert à tout, résume-t-il assez bien. Je peux faire une chanson où je répète tout le temps la même chose, il y a une chute, et c’est terminé. Elle fait 1 minute 20."