"Le Pukkelpop annulé, c'est une cata", juge la Fédération des Festivals Wallonie-Bruxelles
Son président Damien Dufrasne pointe les politiques du doigt. Il dénonce la méconnaissance qu'ils ont du milieu culturel et des grands événements de masse.
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- Publié le 23-07-2021 à 14h19
- Mis à jour le 23-07-2021 à 16h46
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Depuis jeudi, ça sentait le roussi du côté d’Hasselt. Après avoir suspendu le montage des installations et la vente de tickets, le Pukkelpop a annoncé ce vendredi matin jeter l’éponge . Après Tomorrowland, c’est le second des deux grands événements musicaux de masse de l’été en Belgique qui passe à la trappe. En cause : le manque de clarté des décisions prises par les autorités fédérales. “À l’origine, c’est-à-dire après la réunion du comité du 16 juin, un test PCR négatif de moins de 72 heures était suffisant. Lundi dernier, plus d’un mois après les directives originelles, le délai a soudainement été rabaissé à 48 heures. Ce n’est absolument pas un détail anodin lorsqu’il s’agit d’organiser un événement de la taille de Pukkelpop” , ont fait savoir les organisateurs.
S’ajoute à cela les incessants changements concernant la validité ou non des tests antigéniques. “Nous nous préparions initialement à une capacité de 7000 tests par jour sur le site du festival. La modification de la durée de validité du test antigénique rapide et du test PCR signifie que nous devrions tripler la capacité de test. Pour mettre ces chiffres en perspective, il s’agit de 21 fois la capacité du centre de test Park Spoor d’Anvers les jours de grande affluence.” Dans ces conditions, jeter l’éponge s’imposait.
"Plus personne ne s'y retrouve"
Pour Damien Dufrasne, le patron de Dour et de la Fédération des Festivals Wallonie-Bruxelles, le Pukkelpop annulé est synonyme de catastrophe. “Ce n’est pas qu’on s’y attendait mais le gros problème est que le gouvernement change sans cesse les règles. Désormais, c’est presque tous les jours. À un moment donné, tant du côté du public que des organisateurs, plus personne ne s’y retrouve. Même si le bourgmestre donne son feu vert, parfois les gouverneurs de province ou le fédéral intervient en disant que ce n’est plus possible.”
À cela s’ajoutent les augmentations nettes des contaminations qui mettent un stress supplémentaire sur les épaules des autorités. Sans compter le problème de l’âge du public, souligne Damien Dufrasne. “Celui des festivals, et du Pukkelpop en particulier, est très jeune, épingle-t-il. Et donc, pas vacciné. Les seuls moyens de contrôler ces gens-là, ce sont les tests PCR et antigéniques… ” Il n’en démord pas, si la vaccination n’avait pas été si lente au début en Belgique, et bien que l’on soit aujourd’hui le bon élève de la classe, on n’en serait pas là.
La méconnaissance du secteur
Une vaccination hésitante au début, d’incessants changements dans les mesures imposées… Le président de la Fédérations des festivals francophones se sent-il trahi par les politiques ? Le mot est trop fort, dit-il, mais ils ont leur responsabilité. “On l’a vu depuis le début de la pandémie, la faute des cabinets ministériels et ministres, c’est leur méconnaissance du milieu de la culture et des grands événements. Ils croient qu’une manifestation de grande ampleur s’organise en une semaine ou en 15 jours. Et que l’on peut changer la donne en quelques jours. Or, on ne peut pas tout chambouler. Il faudrait qu’un jour ils viennent avec nous quelques heures pour qu’on puisse leur expliquer ce qu’est réellement un festival de musique.”
Pour 2022, l'horizon n'est pas encore dégagé
“J’espérais au moins que Tomorrowland et le Pukkelpop allaient avoir lieu. Quand le premier a été annulé, on a reporté nos espoirs sur le second. Finalement, on ne fera la fête nulle part, déplore Damien Dufrasne. Et on n’aura pas non plus un labo d’essai et de comparaison pour 2022, ce qui n’est pas une bonne chose.” Car désormais, c’est bien vers l’année prochaine que se portent tous les regards. Et l’horizon n’est pas vraiment plus clair, malheureusement.
Les organisateurs auront les yeux rivés sur les variants et l’efficacité des vaccins à leur encontre. Sur la vaccination aussi, avec l’espoir que les jeunes auront reçu leurs deux doses. Damien Dufrasne se veut positif. “On va vers le bon”, glisse-t-il. Pourtant, le gouvernement ne donne toujours pas la moindre perspective pour la saison des concerts en salle, soit dès le mois de septembre. “Il faut qu’il nous dise à quelles conditions un concert peut avoir lieu à l’AB avec 700 ou 800 personnes. Tant que les salles de concert ne revivront pas normalement, ça mettre toujours en péril les événements de l’été.”
Le Covid Safe Ticket comme seule porte de salut?
Il pense aussi que le Covid Safe Ticket, celui qui impose d’être vacciné complètement depuis plus de deux semaines, d’apporter la preuve que l’on a fait le Covid ou de présenter des tests PCR ou antigéniques négatifs pour accéder à un événement, devra encore perdurer tant qu’il ne sera pas acquis que la plupart des gens sont vaccinés ou protégés. Même s’il ne se prononce pas sur l’opportunité de suivre la France où ces tickets sont désormais de mise pour toutes les manifestations de plus de 50 personnes, Damien Dufrasne juge “qu’il s’agit peut-être le seul moyen à l’heure actuelle permettant de rouvrir normalement la culture ou des lieux de masse.” “Ça met la pression sur les gens et ça va peut-être les pousser à se faire vacciner. En France, suite à l’annonce d’Emmanuel Macron, il y a eu 3 millions de vaccinations supplémentaires en deux ou trois jours” , conclut-il.
En attendant, il ne reste qu’un seul événement musical de plus de 10000 personnes cet été en Belgique, c’est Ronquières et c'est en Wallonie. "J’ai dit aux organisateurs qu’on y croit, même si ce n’est pas la même chose qu’une toute grande manifestation et que le public sera peut-être un peu plus âgé que celui du Pukkelpop.” Ces derniers y croient aussi. Quant aux détenteurs de tickets, ils croisent les doigts...