En un acte et 90 minutes, "Il Signor Bruschino" dit le génie de Rossini
Publié le 10-08-2021 à 17h23 - Mis à jour le 11-08-2021 à 16h16
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La diversité de l'œuvre de Rossini est telle que, au Festival de Pesaro, on peut alterner grandes formes et ouvrages plus modestes. Ainsi de ce Signor Bruschino donné dans la bonbonnière du Teatro Rossini, composé par le maestro à 20 ans et curieusement mal accueilli par le public vénitien.
Curieusement, parce que l'œuvre est habile et concentre déjà, en 90 minutes, tout le génie mélodique, rythmique et harmonique de Rossini, et sa fameuse vis comica. Partant d'une situation rabâchée (un tuteur veut marier sa pupille au fils d'une relation d'affaires, mais la belle en aime un autre), le livret joue la carte de l'absurde : le bien-aimé se fait passer pour le prétendant officiel, tant et si bien que le père de ce dernier - le fameux Bruschino - croit devenir fou quand chacun tente de le persuader que cet inconnu est bien son fils.
Le compositeur ose plusieurs nouveautés dans sa partition, la plus célèbre lui ayant même valu la postérité : durant l'ouverture, certains violons se font percussion en frappant de l'archet leur lutrin. En réalité, l'insuccès de la création semble avoir résulté d'un conflit entre Rossini et le directeur du Teatro San Mosè : quelques jours plus tard, il allait rencontrer un succès énorme avec sa Tancredi, donnée dans un théâtre vénitien concurrent - la Fenice.
Vieux routier et jeunes talents
Deuxième prix au Concours de chef d'orchestre d'opéra de Liège en 2017, Michele Spotti dirige la soirée avec une verve communicative, mais en chérissant aussi les moments lyriques. Une belle affiche mêle vieux routier (Pietro Spagnoli en père Bruschino) et jeunes talents émergents (la soprano espagnole Marina Monzo et le ténor américain Jack Swanson en amoureux contrariés, mais aussi le baryton italien Giorgio Caoduro en tuteur), et la mise en scène du duo canadien Barbe & Doucet est idéale : décors élégants dans les teintes pastel (un petit port méditerranéen), lumières raffinées, véritable direction d'acteurs à chaque instant, tout est là pour prouver que les "farces" rossiniennes en un acte n'ont rien de lourdes farces vulgaires.
Pesaro, Teatro Rossini, les 13, 15 et 18 août ; complet.