Concours Reine Elisabeth: le Coréen Taeguk Mun crée les "5 Albumblätter" de Widmann
Une heureuse découverte prolongée par Schumann lui-même
- Publié le 30-05-2022 à 21h52
- Mis à jour le 04-06-2022 à 00h09
Il faudra s'y faire : pour des raisons de coordination d'antenne avec la VRT, le début des concerts de cette finale 2022 aura systématiquement lieu avec 15 minutes de retard. Dans le joyeux tumulte d'une salle visiblement à la fête, le Brussels Philharmonic eut donc tout le temps de s'installer sur la scène, le jury derrière à sa table, Stéphane Denève sur son estrade de chef, et nos souverains dans la loge royale, avant une éclatante Brabançonne. Il revint ensuite au premier finaliste de la semaine, le Coréen Taeguk Mun, 28 ans - formé à la Juilliard School de New York et au Conservatoire de Boston - de créer l'œuvre imposée du compositeur allemand Jörg Widmann. Au simple énoncé du titre « 5 Albumblätter » , on y perçoit la référence à Schumann et à son univers juvénile, poétique et amoureux.
Et de fait… La sublime cantilène d'ouverture entamera un tissage souple et chatoyant d'évocations (et même de fugitives citations) de Robert et d'échappées jouissives dans un langage contemporain ciselé, fulgurant, dansant et savamment orchestré. Il faudra attendre les autres versions pour faire des comparaisons, mais il est sûr que Taeguk Mun vient d'offrir une magnifique création, portée par une ligne de chant ample et chaleureuse et une grande finesse technique. Et que peut-on rêver de mieux que d'enchaîner avec Schumann lui-même et son concerto en la mineur op.129. Trois mouvements traditionnels enchainés traversés par un même élan et des thèmes communs mais des ambiances bien différentes. En musicien accompli, et cultivé, le jeune violoncelliste opte pour des sonorités plutôt fines, modérément vibrées mais souples et expressives. Dans un climat d'élégance bienvenu, les tempos sont plutôt allant avec une parenthèse poignante et d'une infinie douceur, dans le mouvement central, Lebhaft, soutenu avec tact par l'orchestre. On appréciera une impétuosité extrême dans le finale, Sehr Lebhaft, mené comme une danse éperdue et bondissante, fût-ce au prix de quelques tensions dans les passages plus rapides.