Les Strokes n'en ont "rien à f*****"

Le groupe de rock new yorkais se produisait au festival Primavera de Barcelone, vendredi soir, après sept ans d'absence.

Les Strokes n'en ont "rien à f*****"
©Christian Bertrand

Il faut savoir souffrir pour assister au retour d'une icône. Annoncés à Barcelone le week-end dernier, les Strokes avaient été contraints d'annuler en dernière minute la première de leurs deux dates programmées au festival Primavera. Touché par le Covid, "l'un des membres du groupe" était coincé au lit, les autres étaient bons pour une semaine de tourisme dans la cité catalane. On imagine bien Fabrizio Moretti (batterie) et Albert Hammond jr (guitare) à la plage, Nick Valensi (guitare) dans un café branché du Raval, et Nikolai Fraiture (basse) seul, dans sa chambre, en plein questionnement sur le sens de la vie.

Les Strokes n'en ont "rien à f*****"
©Christian Bertrand

Ce vendredi soir, il flotte donc comme un léger mais enivrant parfum de victoire dans le Parc Del Forum : le groupe de rock le plus influent du début des années 2000 est bel et bien confirmé. Dès 21h, soit deux bonnes heures avant la montée sur scène du quintet new-yorkais, une impressionnante marée humaine se dirige vers les deux grandes scènes principales. Lorde est en pleine activité, face à quelques jeunes femmes en délire, et plusieurs milliers de visages incrédules mais résignés, attendant patiemment que la chanteuse néo-zélandaise libère les lieux. La légèreté est palpable, la nostalgie plus encore, et ces deux sentiments s'effacent derrière l'euphorie lorsque Julian Casablancas lance les premières paroles de "Bad Decisions".

Les Strokes n'en ont "rien à f*****"
©Sergio Albert

Simple, efficace la scénographie est volontairement vintage. Fab Moretti domine les autres membres du groupe derrière ses fûts, et un Casablancas des très grands soirs assure le show pendant que ses petits camarades attendent gentiment la fin de ses intermèdes délirants. "Hello Barcelona" lance le frontman, caché derrière une paire de lunettes de soleil. "Nous voilà, finalement, on ne vous a pas dit qui avait le Covid, mais en fait... C'ETAIT MOI" s'amuse-t-il, avant d'enchaîner sur "Hard To Explain", "Selfless" et "Juicebox". Hormis la jolie petite erreur d'un stagiaire de la régie qui n'avait pas donné de volume au micro du chanteur, le son est plutôt bon, l'audience peut chanter à tue-tête.

Les Strokes n'en ont "rien à f*****"
©Christian Bertrand

L'ambiance est plus calme que la veille, mais le public reprend en choeur la totalité des paroles. Avec les années, les Strokes ont perdu en intensité ce qu'ils ont gagné en aura. On se croirait dans une grande réunion de famille, une séance de retrouvailles avec de vieux amis portée par "Someday", "Reptilia" puis "The Adults Are Talking". "On m'avait dit que je jouerais devant mes amis catalans" lance Casablancas, manifestement bien perché, ravi et tout sourire. "Mais je vois que c'est un public international. Et vous savez quoi ? ON N'EN À RIEN À F****. C'est 2022 les mecs ! Peu importe d'où vous venez !" hurle-t-il joyeusement avant d'enchaîner sur "You Only Live Once", "Under Control" et "Take It Or Leave It".

Les Strokes n'en ont "rien à f*****"
©Sergio Albert

Stoïques, Albert Hammon Jr, Nick Valensi et Nikolai Fraiture assurent totalement au niveau musical entre les pitreries de leur frontman, qui essaie d'étrangler le premier avec le fil de son micro, manque trois fois de bousculer le second en se baladant sur scène, et refile de force le micro au troisième pour lui demander de remercier la foule. Casablancas est l'âme de ce groupe, qui semblerait bien trop sage sans cette incontestable figure de rockstar bourrée d'autodérision. "Brooklyn Bridge to Chorus", "New York City Cops" et "Under Cover Of Darkness" viennent ponctuer le show. "Threat Of Joy" fait office de rappel alors que tout le monde attendait "Last Night" ou "Heart In A Cage". "Ca, c'est un peu décevant" nous lâche un festivalier, "ces mecs sont vraiment égoïstes". C'est vrai, les Strokes n'en ont "rien à f*****" comme le dit régulièrement Julian Casablancas durant la soirée, et ils ont bien raison.

Vous êtes hors-ligne
Connexion rétablie...