Sylvie Kreusch chante ses plaies
Révélation de l'année, l’artiste anversoise dissèque sa rupture amoureuse sur le très beau "Montbray" et sera en tournée tout l'été, à commencer par un passage à Werchter Classic ce samedi.
- Publié le 23-06-2022 à 13h02
- Mis à jour le 26-06-2022 à 15h04
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Que peut-on encore raconter sur les peines de coeur, l'amour perdu, les ruptures cruelles ? Tout semble avoir déjà été décrit dans les drames amoureux. L'artiste belge Sylvie Kreusch dédie pourtant son premier album, Montbray *** , à cette période orageuse et choisi d'y raconter la sienne. Ses ressentis sont partagés sans pudeur, ses mots libérés des qu'en-dira-t-on. Dans ce cas-ci, l'honnêteté l'emporte sur l'originalité. Sur "Falling High", elle se remémore les derniers moments tendres, regrette les projets avortés et déplore l'abandon des promesses. "Shangri-la" évoque, lui, plutôt l'absence physique tandis que "Haunting Melody" revient sur la colère couvée après une trahison.
L’ancienne membre du groupe Soldier’s Heart va, malgré tout, jusqu’à dire que sa séparation a été une chance. “Sur le moment, une rupture n’est pas agréable à vivre. Mais après, on se sent béni d’avoir vécu tout ça, assure-t-elle. Je suis contente d’être une musicienne, d’écrire des chansons, je peux faire quelque chose de mes sentiments, de mon cœur brisé. Je ne sais pas ce que j’aurai fait si je n’avais pas la musique comme échappatoire.” Elle admet avoir plus de mal à écrire aujourd’hui, alors que “rien de dramatique” ne se passe dans sa vie.
La conception de ce premier long format solitaire débute il y a deux ans, à la fin de sa relation avec Maarten Devoldere du groupe rock Balthazar, avec lequel elle était en duo pour Warhaus. L’allocutaire de Montbray n’est pas caché. Ce dernier apparaît même dans son clip “Let It All Burn”. “Nous sommes devenus amis avec le temps. Il était partant tout de suite pour le clip. Il s’est dit que comme je me moquais déjà de lui dans la chanson, le mieux était peut-être d’en rire lui aussi. C’était malin de sa part !”, plaisante-t-elle. De son côté, la moitié du duo gantois, évoque également leur rupture dans son dernier disque, Sand (2021), sur la chanson “Leaving Antwerp”. “Aujourd’hui, on peut rire de toute cette situation ensemble.” La preuve, Sylvie Kreusch occupe depuis les premières parties de Balthazar.
Maarten Devoldere a souvent décrit l’Anversoise de 31 ans comme sa muse. Un statut qu’elle entend bien dépasser aujourd’hui. “Je pense qu’au début, on le prend vraiment pour un compliment d’être perçu comme une inspiration. Mais après, on veut aussi être perçu comme une artiste à part entière. Cependant, je ne me suis jamais sentie comme seulement la jolie petite copine sur laquelle on peut écrire des histoires”, assure-t-elle. Depuis 2018, elle distille quelques singles et EP, déjà convaincants à l’époque. Avant le coup d’éclat de Montbray. Un vrai départ en solo qui lui a demandé un peu de temps et de confiance. “Pendant longtemps, j’ai eu peur d’écrire mes propres chansons. L’industrie musicale reste dominée par les hommes. On me voyait comme la jolie fille sur scène, on me demandait de chanter discrètement… C’est seulement il y a quelques années que j’ai enfin eu le courage de me libérer, de ne plus compter sur les hommes.”
Montbray a été composé pendant le premier confinement, dans un petit village français qui donne son nom à l’album. Elle y reste pendant plus d’un mois avec son guitariste, Jasper Segers. “L’endroit est devenu très important pour moi et pour l’album. Je crois que le son du disque a été beaucoup influencé par le lieu. Si la vie avait continué, que des fêtes étaient encore organisées ou j’étais restée en ville, j’aurais peut être pris une autre direction musicale. Ici, j’ai fait beaucoup de ballades.” Ses précédentes chansons étaient plus dansantes, très rythmiques. Sa dernière livraison met davantage en avant les mélodies que les rythmes pour offrir une atmosphère planante, sensuelle, à la croisée du trip-hop, rock et de la pop.
Les percussions restent néanmoins une part importante dans son travail. Sur scène, elle insiste pour être accompagnée de deux batteurs et de percussionnistes, en plus du traditionnel trio guitariste, bassiste et claviériste. “J’ai besoin que ma musique soit chaleureuse, douillette, réconfortante”, assure-t-elle. Une manière d’équilibrer la froideur et douleur des écrits.
En concert le 25/06 à Rock Werchter Classic, 15/07 au Gent Jazz (Gand), 16/07 au Dour Festival, 18/08 au Pukkelpop (Hasselt)