Le musée "Fin de siècle" contraint de déménager? La polémique s'amplifie...
L’annonce par Elke Sleurs (N-VA) du retour de l’art moderne au musée des Beaux-Arts fait l’effet d’une bombe. Réactions.
Publié le 09-12-2014 à 17h39 - Mis à jour le 10-12-2014 à 06h27
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Nous avions annoncé ce mardi l’intention de la secrétaire d’Etat à la Politique scientifique, Elke Sleurs (N-VA), de replacer les collections d’art moderne et contemporain du musée des Beaux-Arts, stockées dans les réserves depuis 2011, dans les bâtiments historiques du musée des Beaux-Arts, à la rue de la Régence (voir ici). Ce qui, dans les faits, si cela se concrétise, signifierait la fin de l’idée du musée provisoire d’Art moderne dans les anciens magasins Vanderborght, malgré les 750 000 euros déjà dépensés dans une étude préalable et un montant de 7 millions d’euros bloqué pour les travaux. Cela signifierait aussi la fin d’un transfert futur des collections du musée dans le garage Citröen au Canal, que la Région bruxelloise veut transformer en nouveau musée d’Art contemporain et que Rudi Vervoort annonce vouloir faire quoi qu’il arrive (mais cela aura-t-il encore un sens sans les collections fédérales ?).
Remettre dans le "puits"
On pensait qu’Elke Sleurs voulait par cela réhabiliter l’aile du musée fermée depuis 2005 et toujours en attente de rénovation par la Régie des bâtiments. Il y aurait un sens à utiliser cet espace pour l’art moderne. Mais en réalité, elle veut bien plus. Comme le disait "De Standaard" (confirmé ensuite par elle), elle propose de replacer l’art moderne et contemporain dans la place où il était (le "puits" créé par l’architecte Roger Bastin, aux étages -4 à -8). Or, c’est là qu’on a créé pour 7,5 millions d’euros le nouveau musée Fin de siècle. Cela signifierait que ce musée devrait déménager. "La collection d’art moderne y a bien été de 1981 à 2011 alors que le musée Fin de siècle n’y est que depuis un an ", dit Elke Sleurs.
De plus, cela signifierait pour elle qu’on renverrait la collection Art nouveau Gillion Crowet acquise par la Région bruxelloise en dation, en échange de droits de succession pour une valeur de 22 millions d’euros. Cette collection largement d’arts décoratifs a été intégrée à grands frais, par une scénographie spécifique, au musée Fin de siècle dans l’optique d’un musée thématique voulu par le directeur Michel Draguet et dans une optique d’un projet de fusion entre le musée des Beaux-Arts et le musée du Cinquantenaire, fusion aujourd’hui enterrée.
Va-t-on alors envoyer cette collection au Cinquantenaire ou au futur musée de la Région bruxelloise ?
Voilà un énième rebondissement de ce dossier toujours chaud depuis l’annonce de la fermeture du musée d’Art moderne en 2011. Sans doute pas le dernier.
Roland Gillion : "Il y a une convention à respecter"
Cette annonce par Elke Sleurs demande bien sûr encore à être concrétisée. C’est un dossier qui a connu déjà bien des péripéties et tout rechanger comme cela, a un coût qu’il faut bien évaluer. Mais elle a déjà suscité de nombreuses réactions. Michel Draguet, le directeur du musée des Beaux-Arts, le premier concerné, n’a été prévenu de rien et ne souhaite pas encore à ce stade réagir dans les médias.
Le ministre-Président de la Région bruxelloise, Rudi Vervoort, a réagi à nouveau, par un tweet : "Le projet Citroën se fera ! J’invite d’ailleurs Elke Sleurs à venir découvrir Bruxelles et les projets que nous y développons."
L’échevine de la Culture à Bruxelles, Karine Lalieux (PS), directement concernée par le sort du Vanderborght, un bâtiment appartenant à la Bille, nous a donné sa réaction : " On a des informations contradictoires. Dans la note de politique générale présentée par le vice-Premier ministre Jan Jambon (N-VA), responsable de la Régie des bâtiments, il était explicitement prévu de financer l’étude pour une installation provisoire du musée d’Art moderne au bâtiment Vanderborght que nous avions acquis pour le fédéral. Je ne comprends pas qu’une autre ministre dise maintenant le contraire. Quant au musée Citroën au Canal, c’est une belle opportunité pour Bruxelles mais que la décision d’Elke Sleurs va rendre plus difficile, dommage pour Bruxelles."
Reprendre les Magritte
Roland Gillion a aussi réagi et rappelle qu’il existe une convention signée en 2006 entre la Région bruxelloise (Picqué et Van Hengel), le fédéral (Verwilghen) et lui-même, qui fixe les conditions de la dation à la Région bruxelloise, contre des droits de succession, de la collection Art nouveau et de tableaux et objets attenants. La convention implique que la Région place en dépôt la collection au musée des Beaux-Arts. Dans ce cadre, Roland Gillion a prêté, ou donné, de nombreuses œuvres en plus, au musée des Beaux-Arts et au musée Magritte (neuf tableaux, dont "L’Empire des lumières"). Si la convention était dénoncée, il nous a dit être prêt dans un premier temps déjà à retirer toutes les œuvres prêtées, y compris les neuf Magritte. Et on se souvient de la menace de Charly Herscovici qui détient les droits sur Magritte, d’une fermeture du musée Magritte si les tous les prêteurs se retiraient. Roland Gillion rappelle qu’il a aussi payé un million d’euros pour l’aménagement des salles de sa collection dans le musée Fin de siècle.