Quel avenir pour le Cirque royal?
Musique Brussels Expo, qui gérera la salle de spectacle dès juillet, a présenté son projet.
Publié le 16-11-2016 à 05h58 - Mis à jour le 16-11-2016 à 10h32
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"Redynamiser et valoriser le Cirque royal, dans le cadre d’un pôle de salles", le moderniser, diversifier son activité, et ce dans un modèle économique "pérenne" participant au rayonnement de Bruxelles. Tels sont les grands objectifs avancés par Brussels Expo, concernant la célèbre salle de spectacle de la rue de l’Enseignement.
Pour rappel, le 10 novembre, le Collège de la Ville a annoncé que son choix, pour la gestion future de la salle, se portait sur l’asbl Brussels Expo - choix qui devrait être entériné sous peu par le conseil communal. Depuis 1999, le Cirque royal est géré par le centre culturel Le Botanique - qui n’a pas démérité. Mais en 2015, la Ville, propriétaire de la salle et désireuse de la reprendre dans son giron, a résilié ce contrat d’exploitation. Avant d’être obligée, en raison d’un recours, de lancer un appel à projets. Le Botanique et la société Sportpaleis (en initiative conjointe), d’une part, Brussels Expo, de l’autre, y ont répondu. C’est donc cette dernière qui a été retenue. Sans grande surprise peut-on dire, puisqu’il s’agit d’une asbl de la Ville - dont le président du CA est l’échevin Philippe Close.
Brussels Expo gère déjà les halls d’exposition du Heysel mais aussi le Brussels Summer Festival, et deux salles de concert : le Palais 12 (5 000 à 15 000 places) et la Madeleine (500 à 1000 places, bientôt 1500). Ce "pôle" d’activités et de salles (dont les marges sont "réinvesties à 100 % dans lesdites infrastructures bruxelloises) est l’une des forces du projet proposé par Brussels Expo pour le Cirque royal. Décliné en 50 "actions-clés", il a été présenté mardi à la presse.
"Multifonctionnelle"
Il s’agit de faire bénéficier le Cirque royal "de l’expertise des équipes de Brussels Expo", ont expliqué Denis Delforge, CEO, et Denis Gérardy, directeur artistique de l’asbl. La salle sera l’objet d’études et d’éventuels travaux en matière d’acoustique, de sécurité, d’accès PMR et d’optimisation des lieux (nouveaux espaces de création et réaménagement de la salle des "écuries" pour des expos et événements). Des systèmes de billetterie intégrée et de promotion "multi-salles" (au sein du "pôle") et le développement d’une offre VIP sont également annoncés, ainsi que des "packages" billet + transport + hôtel.
Brussels Expo voudrait aussi favoriser l’enregistrement d’émissions de télé au Cirque, entre autres initiatives visant à "augmenter la notoriété de la salle" mais aussi celle de Bruxelles. Car le Cirque royal est censé ( c’est l’un des trois - étonnants - critères de l’appel à projets) participer directement au rayonnement touristique de la Ville. Y compris le tourisme d’affaires. "Multifonctionnelle", la salle accueillera aussi "des événements connexes à des salons internationaux organisés au Heysel".
D’autres mesures, telles le soutien aux artistes locaux et la création d’une carte de fidélité, rejoignent en fait le fonctionnement actuel du Cirque.
"Attirer un maximum de spectateurs"
Côté programmation, les choses ne sont pas encore précises, mais à ce stade on ne s’attend pas à un bouleversement. "Brussels Expo , rappelle d’abord Denis Gérardy , est gestionnaire de salles, et non programmateur." "Le Cirque royal est avant tout une salle de music-hall - et non de niche - à la programmation très large . Il doit attirer toutes sortes de spectacles (musique, mais aussi théâtre, danse… - c’est déjà le cas). Notre but est d’attirer un maximum de public."
Rendez-vous en 2017 pour le vérifier, sauf nouveau recours. La nouvelle concession prend cours le 1er juillet, pour une durée de 27 ans. En attendant, son processus d’attribution et, sur le fond, le fait qu’un pouvoir public se mue en gros exploitant de salles de concerts, suscitent pas mal de critiques et d’interrogations.
Le Palais 12 en question
Des questions, par ailleurs, se font jour concernant le Palais 12 : l’agenda de la grande salle bruxelloise s’avère très clairsemé en ce moment. Brussels Expo, gestionnaire, ne cache pas qu’il est "déçu par cette programmation trop faible" - tout en affirmant que la salle "est rentable" à ce stade. Un différend avec LiveNation, principal organisateur de concerts en Belgique, explique en partie cette baisse de fréquentation. Mais Brussels Expo avance aussi "le contexte difficile en 2016, en particulier à Bruxelles" et le temps nécessaire à un nouvel acteur (le Palais 12 a ouvert en 2013) pour prendre sa place dans le paysage musical. En outre, sur certains concerts, le Palais 12, avec ses 15 000 places, ne peut rivaliser avec le Sportpaleis anversois (23 000 places), constate Denis Delforge. "Adele, Céline Dion, vous ne les verrez pas au Palais 12".
"Sans le Cirque, le Botanique est amputé d'une grande salle"
Paul-Henri Wauters est programmateur du centre culturel Le Botanique à Bruxelles. Alors que Brussels Expo vient de convier la presse afin de présenter son projet pour le Cirque royal, dont le Botanique s'est vu signifier la fin de la gestion, on l’interroge sur son état d’esprit.
"L’état d’esprit actuel, c’est d’avoir des partenaires à Bruxelles qui nous soient solidaires pour nous accueillir. Si la Ville de Bruxelles envisage que les Nuits Botanique puissent prendre place au Cirque royal l’an prochain, c’est eux qui le disent, ce n’est pas nous. On en prend bonne note, mais il faut bien se rendre compte que la Ville de Bruxelles se doit aussi d'avoir un taux d'occupation maximale. La décision finale va normalement tomber lundi prochain lors d’un Conseil communal à huis clos. Le huis clos est requis pour des sujets qui troublent potentiellement l'ordre public. C'est étonnant, non ?"
D'ici lundi, qu'espérez-vous encore ?
Il y a encore des possibilités de résistance. On est en train de les étudier avec nos conseils. Malgré le fait qu’on était conscient qu’on n’avait aucune chance, on a élaboré un dossier avec le plus grand respect des conditions, on a joué le jeu jusqu’au bout alors qu’on savait que la cause était perdue.
L'association avec le Sportpaleis n'a-t-elle pas, finalement, été une faiblesse ? Brussels Expo avançant qu'il allait réinvestir les marges bénéficiaires de ses activités dans le patrimoine bruxellois...
Non seulement ce n'était pas une faiblesse, mais c'était même une grande force parce que dans la logique Botanique-Sportpaleis, au regard des chiffres moyens du bilan des comptes réalisés ces dernières années, et cela sans augmenter l'activité, cela dégageait des marges suffisantes pour permettre d'investir en une fois 3 millions d'euros en rénovation le jour de l'ouverture du contrat. Il s'agit d'argent provenant de l'extérieur, investi à Bruxelles. Ce qui signifie, que du côté de la Ville de Bruxelles, cela lui aurait permis d'investir dans des choses plus urgentes.
Quelles conséquences pour vous de ne plus être gestionnaire ?
Les conséquences directes c'est que cela nous ampute d'une grande salle dans notre rayon d'action. Un artiste gravit les échelons des salles. En ce qui nous concerne, Rotonde, Orangerie et, jusqu'il y a peu, Cirque royal. Puis après avoir joué devant 2000 personnes, il pouvait espérer se produire dans les festivals d'été, ou les stades. Il y en a très peu. Mais Stromae, Puggy, par exemples, en font partie. Nous, on a développé pendant 18 ans un tremplin ou une piste de décollage. Maintenant, on espère continuer à le faire, en s'associant à d'autres salles.
Les Halles de Schaerbeek ?
Pourquoi pas ? Le problème avec les Halles, c'est que c'est une salle qui a développé une vocation de spectacles de théâtre et danse pour lesquels l'agenda est beaucoup moins libre qu'une salle qui a une vocation de concerts.