Les centres culturels, laissés dans le flou, réclament de la cohérence
La directrice de la Fédération des centres culturels plaide pour des perspectives claires.
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- Publié le 02-06-2020 à 07h52
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La directrice de la Fédération des centres culturels plaide pour des perspectives claires.
Patricia Santoro est la directrice de la Fédération des centres culturels, soit 119 centres culturels reconnus par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Si son secteur s’est montré jusqu’à présent discret dans les médias, aujourd’hui, elle constate un certain "énervement" parmi ses opérateurs qui, portes closes depuis la mi-mars, attendent des réponses et des perspectives claires lors du prochain Conseil national de sécurité (CNS) du 3 juin. "Les centres culturels couvrent trois dimensions importantes, rappelle Patricia Santoro. La première, c’est l’accès à la culture (arts de la scène et arts plastiques). La deuxième, c’est la participation à la vie culturelle, et, enfin, l’émancipation, c’est-à-dire aider les citoyens à porter un regard critique sur la société dans laquelle ils évoluent." Or, regrette-t-elle, "dans les plans de déconfinement édictés par le CNS, ces deux dernières dimensions sont complètement ignorées. Cela nous donne l’impression que la culture se résume aux gros festivals de l’été et à la diffusion en salles, alors que ce n’est pas que ça".
Face aux inconnues et aux incertitudes quant à une reprise de ses activités, le secteur culturel a pris les devants en identifiant des pistes concrètes en vue du déconfinement. Dont la Fédération des centres culturels. "Le cabinet de la ministre de la Culture nous a demandé de lui soumettre un protocole de déconfinement, il y a déjà un mois. Nous avons réfléchi par types d’activités plutôt que pour le secteur dans sa globalité puisque les centres culturels proposent des choses très différentes, explique Patricia Santoro. Exemples ? Les centres culturels qui ont des espaces d’expositions pourraient rouvrir en même temps que les musées ; ou les stages pourraient reprendre en parallèle du secteur de la jeunesse. Ce document devait servir de base à la négociation interministérielle du 12 mai. Il a également été soumis au Groupe d’experts en charge de la stratégie de sortie du déconfinement (GEES). Mais depuis lors, nous n’avons plus du tout eu d’informations."
"Notre action est primordiale"
Or, entre-temps, au fil des CNS, "les choses ont bougé pour d’autres secteurs". Ainsi, les musées sont à nouveau accessibles au public depuis le 19 mai et les maisons de jeunes ont repris leurs activités le 25 mai - sous de strictes conditions de sécurité. "Pour nous, ça manque de cohérence, déplore Patricia Santoro. Nous faisons des activités tout à fait similaires, mais certains peuvent reprendre et pas d’autres. Pourquoi ? Peut-être parce que l’on déconfine plutôt par secteurs et non par activités ? Mais on voit bien que ce n’est pas le cas dans d’autres sphères : on n’a pas autorisé les magasins de chaussures à rouvrir et pas les bijouteries." Elle s’interroge dès lors sur "la vision que les politiques ont de notre action et la place qu’ils souhaitent lui accorder".
"C’est interpellant. Notre action me semble pourtant primordiale et d’autant plus en période de crise, qui est un moment opportun pour mettre en exergue nos dimensions d’analyse critique et d’émancipation."
Si tous les opérateurs sont en attente du CNS du 3 juin, "ils ont déjà réfléchi à une série de projets ou d’activités pour l’été et après". Dans leurs cartons ? Des projections de films en plein air, des déambulations artistiques dans les rues, des spectacles circassiens au pied d’un immeuble… avant une rentrée dont la programmation pourrait soit être adaptée en fonction des décisions du gouvernement, soit prendre la forme de formules alternatives (des coulisses, des participations à des résidences d’artistes avec un public restreint, etc.).
Mais pour mettre tout cela en œuvre, "aujourd’hui, la première urgence est de disposer d’un plan de déconfinement qui tienne compte de nos spécificités et de l’urgence de nos opérateurs qui doivent pouvoir reprendre le travail. Et qui soit plus cohérent, alerte Patricia Santoro. La culture est un droit et il faut pouvoir déconfiner les opérateurs des centres culturels le plus rapidement possible." La majorité des centres culturels étant subventionnés, "il n’y a pas de grosses difficultés à court terme". En revanche, "je sens une inquiétude sur le plus long terme parce que si, en septembre, on peut rouvrir nos salles mais en devant maintenir tous les contrats qui n’ont pas été réfléchis sur une jauge réduite, cela aura un impact financier majeur, et ça pourrait alors être un problème".