"Une façon de mettre la pression", "le seul moyen d’expression qui nous restait" : ces lieux culturels qui vont braver l’interdiction
Dans le cadre de la 5e action #StillStandingForCulture, du 30 avril au 8 mai, près de 80 centres culturels, cinémas, théâtres,... ouvriront au public, dans le respect des protocoles sanitaires. Et la liste des participants s'allonge au fil des heures.
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- Publié le 22-04-2021 à 20h27
- Mis à jour le 25-04-2021 à 11h09
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"Dans une démocratie, la désobéissance, mesurée, modérée, est-elle le seul moyen d’être entendu ?", s’interroge Albert Maizel, codirecteur du Théâtre de la Toison d’Or (TTO). "À un moment, oui, nous avons eu le sentiment que c’était le seul moyen d’expression qui nous restait. C’est pour cela que l’on s’est joints au mouvement de #StillStandingForCulture." Comme le TTO, ils sont 80 lieux culturels (cinémas, théâtres, centres culturels, festivals, maisons de jeunes, cafés associatifs… la liste est à consulter sur notre site) à avoir annoncé ce jeudi qu’ils ouvriront leurs portes au public dans le cadre de la cinquième action du mouvement citoyen #StillStanding, du 30 avril au 8 mai. Et ce en s’imposant de stricts protocoles sanitaires.
Les tests, "une prise d’otage"
Le moment de cette annonce n’est pas anodin : c’est ce vendredi que le Comité de concertation (Codeco) étudie les pistes et conditions de reprise du secteur culturel, durement éprouvé par six mois de fermeture. "C’est une façon de mettre la pression sur le Codeco, admet Fabrice Murgia, directeur du Théâtre national, qui proposera le 1er mai un concert en extérieur, sur la terrasse du théâtre, pour 50 personnes. Après un an de gestion de la crise, nous ne sommes plus du tout d’accord avec ces inégalités de traitement parce qu’il y a une forme de discrimination sectorielle. Maintenant, on nous dit qu’il va falloir faire des expériences-tests alors qu’elles existent. C’est clairement une façon de perdre du temps ! Quand la rue Neuve a rouvert, on n’a pas testé pour vérifier si c’était sûr ou pas…"
Plus mobilisé que jamais, l’ensemble du secteur culturel, subventionné et non subventionné, (Feas, ACC, Asspropro, Astrac, FCI, Upact) a réitéré, jeudi, que "les événements-tests ne peuvent pas prendre en otage un redémarrage prudent de spectacles", en intérieur et en extérieur, dès le 8 mai. "Le plan concerté Event Confederation est soutenu par les ministres de la Culture en Flandre et en Fédération Wallonie-Bruxelles. Il s’agit d’un plan raisonnable, en cinq phases, qui offre des perspectives alors que la vaccination progresse."
Cinéaste et président de la SA Galeries, Henri de Gerlache estime que "le monde culturel a été déconsidéré depuis le début de la crise du Covid". Si, à l’issue du Codeco, "il n’y a pas de vraies perspectives, je pense que tout le monde va se fédérer et se mettre un peu hors la loi parce qu’il n’y a pas d’autres solutions". De fait, #StillStanding prévient d’ores et déjà : si, vendredi, "les activités culturelles sont autorisées à reprendre immédiatement", les spectateurs pourront être accueillis en toute légalité ; en revanche, si la réouverture des lieux culturels demeure "conditionnée à un calendrier arbitraire, à de énièmes expériences-tests ou à des paramètres épidémiologiques auxquels d’autres secteurs ne sont pas soumis, nous maintiendrons notre programmation".
Des amendes ? Solidarité
Au cinéma Galeries, des projections seront ainsi organisées "à partir du 1er mai, de manière plus ou moins régulière", à destination d’une jauge réduite à 30 % des capacités de la salle. Au Théâtre de l’Ancre, à Charleroi, 15 spectateurs (pour une jauge complète de 102) pourront assister le 30 avril à un talk show d’artistes. "L’idée n’est pas de faire de la désobéissance civile pure et dure, explique Noémi Haelterman, attachée de presse. Mais bien d’accueillir le public en respectant les protocoles sanitaires établis à l’automne dernier." Et d’ajouter : "On verra si on est interrompus ou pas. On préviendra les spectateurs du risque encouru. Dans tous les cas, il s’agit d’une action politique collective. Donc, s’il y a verbalisation ou autre, on soutiendra les spectateurs."
Même détermination du côté du TTO, qui présentera le 1er mai Bon anniversaire Jean de Fanny Ruwet devant 100 spectateurs en intérieur (au lieu des 220 habituels). "Nous sommes très sereins mais, si verbalisation il y a, nous assumerons les coûts, promet Albert Maizel. Nous prendrons nos responsabilités."
#StillStanding se veut, d’ailleurs, confiant : "Nous espérons que les bourgmestres et procureurs n’interdiront pas cette action politique commune, juste et responsable. Nous avons des arguments juridiques de poids et nous contesterons les éventuelles amendes, solidairement, qu’elles soient adressées aux organisateurs, aux spectateurs ou aux artistes."