Cinéma, scènes, musique.. Le secteur culturel déçu des annonces du Codeco : "On se fait balader, clairement"
- Publié le 23-04-2021 à 20h55
- Mis à jour le 29-04-2021 à 20h38
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Directeur du cinéma Palace, au centre de Bruxelles, Éric Franssen reste assez sceptique par rapport aux annonces du Codeco. "Ça fait beaucoup de si et de conditions pas très claires, notamment ces 75 % de capacité sécurisée maximale. Si c’est 75 % de 30 %, ça fait pas beaucoup, déplore-t-il. Nous, au Palace, on pense pouvoir accueillir les gens en toute sécurité avec des jauges quasi complètes. Les protocoles ont déjà été validés par la Ville et la Fédération Wallonie-Bruxelles."
"En mars, les ministres Dermagne et Vervoort disaient : ‘on a été trop durs avec la culture. La prochaine fois, elle doit être sur le haut de la pile…’ Plus d’un mois plus tard, on redescend à chaque fois. Dès que les chiffres sont moins bons, c’est la culture qui en pâtit. Alors que les saunas, les tatoueurs ou les piscines ont pu rouvrir. Cela n’a pas de sens" , se plaint M. Franssen. Qui regrette que l’on mette tout le secteur dans le même sac, alors que, entre un festival de musique et une salle de cinéma, le contexte est très différent. "De Croo disait qu’on allait sortir d’une logique sectorielle pour penser lieu par lieu. Qu’ils le fassent ! Nous, on est prêts depuis des mois. On se fait balader, clairement", résume l’exploitant.
Du côté des distributeurs, Stephan De Potter, codirecteur de Cinéart, se dit soulagé par la perspective d’une réouverture des salles en juin, mais regrette que celle-ci soit conditionnée à des indices sanitaires comme les 500 lits en soins intensifs. "Pendant longtemps, dans la communication gouvernementale, on a parlé de 2 000 lits, contre 1 000 lits aujourd’hui… Pourquoi la capacité maximale a-t-elle changé ?" s’interroge M. De Potter. Qui regrette aussi que, contrairement à d’autres secteurs, le cinéma n’ait touché aucun subside de la part de la Région ou du fédéral depuis le second confinement…
Côté scènes, la colère grondait, la torpeur s’est abattue, la fronde demeure
Depuis l’automne, les théâtres ont affiné leurs protocoles d’accueil du public. Depuis treize mois, les fédérations ont œuvré sans relâche à envisager les possibles, gérer les impasses, défendre un secteur au bord du gouffre. "Toute la semaine écoulée, de cabinet en cabinet, nous avons négocié, réexpliqué, justifié nos demandes, études à l’appui, par l’absence de risque", soupire Virginie Devaster, porte-parole de l’UPAC-T (Union de Professionnel·les des Arts et de la Création - pôle Travailleur·euses).
Vendredi soir, un silence assourdissant semble s’être abattu sur les arts de la scène. "Je suis assommée, et très en colère", confirme notre interlocutrice. "Parler à nouveau d’événements-tests, c’est être aveugle et sourd à toutes les études menées en Europe, prouvant l’absence de contamination dans les lieux examinés et respectant les mesures prescrites." La décision du Codeco montre bien que "la culture reste tout en bas de la liste", et pulvérise toute perspective, souligne-t-elle, outrée par la "dictature sanitaire" qui paraît prévaloir désormais alors que "le politique avait en main une partie de la solution".
"La culture vecteur d’émancipation, d’esprit critique, voire simplement de divertissement, est étrangère à leurs considérations, soit. L’argument de la gestion de risque est écarté, en dépit de toute logique et de leurs propres déclarations d’intentions. Comment faut-il parler à ces personnes pour être entendu ?"
Et maintenant ? "Les fédérations se réunissent en urgence ce samedi ; elles vont se positionner sur l’action judiciaire envisagée. Et feront le point lundi avec l’avocate Audrey Lackner."
La musique live, une nouvelle fois déçue sur une demande pourtant simple
Les salles, festivals et autres acteurs du milieu de la nuit ne s’attendaient pas vraiment à recevoir de bonnes nouvelles. Trop d’espoirs déçus, de manque de considération et de demandes balayées d’un revers de la main par les Comités de concertation successifs. Côté festivals, cela fait belle lurette qu’on a oublié toute édition 2021 en bonne et due forme. Rock Werchter, Couleur Café et le Graspop ont déjà renoncé. Les autres n’avaient qu’une demande simple : que les autorités se prononcent clairement sur l’été à venir, afin de pouvoir annuler sans s’engager personnellement et, donc, sans passer à la caisse. Résultat ? Rien, aucun rassemblement n’est officiellement interdit en juin, juillet, août et septembre. Il va donc, encore une fois, falloir patienter. Réunis au sein d’une "Confédération de l’événement", les principaux acteurs de l’événementiel avaient proposé une jauge de reprise comptant cent personnes en intérieur et 200 personnes en extérieur. Avec cinquante personnes extra-muros dès le 8 mai, l’écart est - encore une fois - considérable. Les salles de concert, elles, ont d’ores et déjà reporté tout événement à l’automne 2021 et au printemps 2022.