Réforme du statut d’artiste : "Peu de pays auront un statut aussi protecteur"
L’Upact s’en félicite, mais demande un cadastre de base des fonctions.
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- Publié le 05-05-2022 à 19h30
- Mis à jour le 05-05-2022 à 19h31
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"Globalement, c'est une bonne nouvelle, se réjouit Pierre Dherte, porte-parole de l'Upact (Union de professionnels des arts et de la création - pôle travailleur), car ce texte répond à beaucoup de nos demandes." Le motif de sa satisfaction ? Mardi, les ministres Frank Vandenbroucke (Affaires sociales, Vooruit), Pierre-Yves Dermagne (Travail, PS) et David Clarinval (Indépendants, MR) se sont accordés en intercabinets sur la réforme du "statut d'artiste" (régime de chômage adapté aux particularités de l'intermittence artistique). Le texte de loi ainsi que les deux arrêtés royaux devraient être adoptés en première lecture ce vendredi en Conseil des ministres.
En vigueur à partir de septembre
Longtemps embourbée dans les complexités institutionnelles - et partant budgétaires - de la Belgique, la création d'un véritable statut d'artiste a pris un coup d'accélérateur à l'aune de la crise sanitaire, laquelle a mis en lumière la grande précarité socio-économique des travailleurs du secteur culturel. À l'automne 2020, le gouvernement fédéral s'est donc engagé, budget de 75 millions à l'appui, à "examiner en concertation avec le secteur et les partenaires sociaux comment poursuivre la réforme du statut social des artistes". Quelques mois plus tard, en avril 2021, était lancé un vaste processus de concertation sectorielle via la plateforme numérique www.workinginthearts.be. En a résulté, en juin 2021, une proposition de réforme rendue publique : c'est la note Wita (pour Working in the arts). Examinée, amendée, précisée… à tous les étages concernés au cours des derniers mois, cette note aboutit, aujourd'hui, à l'instauration d'une véritable protection sociale des travailleurs culturels. "La réforme de la protection sociale, les allocations revues et majorées, c'est pour septembre", a ainsi annoncé Pierre-Yves Dermagne dans Le Soir.
Un accès plus facile
Concrètement, cette réforme s'articule autour de deux axes. Primo, la création d'une "commission du travail des arts". Appelée à examiner les dossiers individuels des demandes d'attestation des travailleurs des arts, elle sera seule responsable de leur reconnaissance. Secundo, la révision de la protection sociale des travailleurs des arts dans la réglementation de chômage. "La simplification drastique des conditions d'accès au statut dans le cadre de la réglementation chômage est une très bonne nouvelle, reprend Pierre Dherte. C'est beaucoup plus facile, principalement pour les plus jeunes." Un travailleur des arts devra désormais prouver 156 jours de travail sur 24 mois, contre 312 jours sur 21 mois actuellement.
De même, "la suppression de la chasse aux chômeurs par le Forem, Actiris et le VDAB est une très bonne chose, soit la suppression de l'obligation de justifier de 156 jours de travail en 18 mois, dont 104 jours sous activité artistique". M. Dherte fait, ici, référence à la notion d'"emploi convenable". "En gros, explique-t-il, si le travailleur des arts ne peut pas justifier ces 156 jours, Actiris, le Forem ou le VDAB peut lui demander d'accepter un emploi non convenable, c'est-à-dire que tout artiste est obligé de devenir vendeur, gardien de parking, etc. C'était une grande contrainte et elle est supprimée."
Pour Marie-Colline Leroy, députée fédérale Écolo qui a suivi de près le processus de refonte du "statut d'artiste", c'est "un soulagement" d'avoir pu trouver un accord, "car la difficulté quand on est à sept (majorité Vivaldi, NdlR) autour de la table, c'est de parvenir à trouver les points de convergence suffisants". Pour sa part, elle épingle la prise en considération des femmes en tant qu'artistes ou techniciennes. Pour conserver ses allocations de chômage, un travailleur des arts devra, à l'avenir, démontrer 78 jours de travail sur trois ans. "Pour une femme en congé de maternité, en revanche, les conditions du renouvellement de son statut sont abaissées à 39 jours sur trois ans. C'était très important pour Écolo." Autre point d'attention, "nous avons veillé à ce que le champ d'application concerné soit représentatif de ce fameux écosystème culturel, c'est-à-dire que tout travailleur nécessaire à la création, la diffusion… culturelle soit pris en compte, comme les techniciens". Enfin, elle se félicite de "la reconfiguration de la commission du travail des arts" ainsi que de "l'augmentation des allocations minimales de chômage".
Appel à la CIM Culture
"Avec ce nouveau statut, la Belgique est novatrice, avance Pierre Dherte. S'il est voté définitivement en l'état - il y a encore des étapes (2e lecture au gouvernement, avis du CNT, prise de position des partenaires sociaux, etc.) -, je pense qu'en Europe, il y aura peu de pays qui pourront se targuer d'avoir un statut aussi protecteur et intéressant pour les travailleurs des arts". Néanmoins, l'Upact restera "vigilante", car "il manque encore cruellement un cadastre, une nomenclature avec une liste non exhaustive des métiers artistiques et technico-artistiques qui rentreront de facto dans ce cadre". "Je lance donc un appel pressant aux entités fédérées, et notamment à la conférence interministérielle (CIM) Culture qui était censée fournir ce cadastre."